mardi 28 novembre 2023

Black Friday : Où habites-tu, macronie ?


La lettre politique de L'Express, 28 novembre 2023
le Parti pris
Black Friday : Où habites-tu, macronie ?
par Erwan Bruckert
Rédacteur en chef adjoint du service politique
Qui diable faut-il écouter ? Qui diable faut-il croire ? Est-ce Emmanuel Macron, qui trompettait il y a un peu plus d'un an et demi, en plein entre-deux tours de l'élection présidentielle dans son discours de Marseille, que ce "quinquennat sera écologique ou ne sera pas" ? Est-ce Emmanuel Macron qui devant les maires de France a, à plusieurs reprises selon Politico, qualifié la campagne de l'Ademe pour le Black Friday de "connerie" ? Sans doute et l'un, et l'autre. En même temps. C'est en tout cas ce dont doit être persuadé le chef de l'Etat, défenseur dévoué du sens de la nuance, fervent militant de la gradation. Mais à force de s'adapter à ses auditoires, aux contingences, à ses séquences politiques thématiques - la semaine "écologie" succédant à la semaine "industrialisation", succédant elle-même à la semaine "revitalisation de l'économie"… -, la nuance est parfois à deux petits doigts de se transformer en ambivalence. Ce n'est pas la première fois. Seulement, cela fait maintenant six ans…

Récapitulons. L'Elysée, Matignon et les ministres de Bercy - dont les premiers concernés Bruno Le Maire et la ministre chargée des TPE, PME, de l'Artisanat et du Tourisme Olivia Grégoire - ont découvert, les yeux écarquillés, la nouvelle campagne de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) contre la surconsommation, lancée la veille du Black Friday. On peut y voir, notamment, un "dévendeur" conseiller à un client de ne pas acheter de nouveaux polos dans un magasin, puisque le sien est en parfait état… Bref, une ode à la sobriété. Rappelons-nous "la fin de l'abondance", dixit Emmanuel Macron, qui marque notre nouvelle ère en plein bouleversement. Validés en amont par le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu, les quatre spots ont créé une vague de protestation chez les associations de commerçants de proximité, jusqu'à Michel-Edouard Leclerc, dont les enseignes, c'est bien connu, favorisent le textile français, le circuit court et luttent de toutes leurs forces contre la "fast fashion".

Au sein du ministère de l'Economie aussi, on s'étrangle. Sur Franceinfo, Bruno Le Maire a qualifié la campagne de "maladresse", arguant que les mises en scène dans des magasins physiques faisaient le jeu des plateformes numériques ; le téléphone d'Olivia Grégoire, lui, sonne sans discontinuer depuis deux jours. Chacun défend sa clientèle, surtout au moment où le président de la République conclut une semaine consacrée à la vie économique et la compétitivité du pays. Un épisode de plus dans les relations tumultueuses entre le ministère de l'Ecologie et Bercy : il suffit de feuilleter le livre de la journaliste Justine Reix, La Poudre aux yeux (JC Lattès), pour se faire une idée de leurs ambitions divergentes, voire contradictoires. "Il faut prendre conscience que ces sujets angoissent les Français, on doit être responsables, on ne va pas faire l'écologie contre les gens, il faut les embarquer", considère-t-on dans l'entourage de Bruno Le Maire, où les lubies qui s'apparentent à une forme de décroissance n'ont pas tellement bonne presse. Une preuve, aussi, de la qualité de l'huile qui fait fonctionner les rouages des différentes composantes du gouvernement… "Ça pose quand même la question du pilotage général, glisse un ministre de plein exercice qui confirme l'ire de l'Elysée et Matignon. Pourquoi tout ça n'est pas plus interministérialisé ? Ne serait-ce qu'avec Bercy, ils ont des défauts, mais tout de même…"

Puisque gouverner n'est pas seulement prévoir mais aussi établir des priorités, il est judicieux de se poser la question de celles du gouvernement et d'Emmanuel Macron. La croissance et le plein-emploi ? Le virage écologique ? En raillant publiquement les spots validés par Christophe Béchu sans prendre le soin, par la suite, de faire nuancer son propos par ses équipes élyséennes, le chef de l'Etat a choisi son camp. "L'écologie pragmatique", comme on le scande souvent en macronie ? Encore faudrait-il connaître ses contours. Son sens. À l'aune de cette nouvelle péripétie gouvernementale, et des précédentes, on peut se risquer à une définition : qui dit "pragmatique" dit "qui n'embête pas les Français", pour paraphraser élégamment Georges Pompidou. À l'exception de la réforme totémique des retraites, l'exécutif semble avoir comme ligne directrice cette devise, reliquat, notamment, du mouvement des gilets jaunes. Tant pis s'il faut pour cela discréditer un ministre de l'Ecologie qui, une fois n'est pas coutume, avait passé le mur du son (et passé outre les consignes de Matignon de retirer les spots pro-sobriété). Tant pis si leur message principal, et capital pour toute bonne politique écologique qui se respecte, s'en trouve appauvri. Qui disait, déjà, qu'il fallait savoir "prendre son risque"?
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5 commentaires:

Anonyme a dit…

Quand la Collombophilie roucoule...
"À la Saint Saturnin éponge ton chagrin"

"Entré au gouvernement d’Édouard Philippe en mai 2017, Gérard Collomb a été le premier ministre de l’Intérieur de la présidence d’Emmanuel Macron, jusqu’en octobre 2018. Lors de la cérémonie d’investiture du chef de l’État, il n’avait pas pu retenir ses larmes, une séquence sur laquelle le chef de l’État est revenu : « Si à l’heure de la cérémonie d’investiture vous versiez d’inoubliables larmes, c’est à nous, à moi, d’être aujourd’hui étreint par le chagrin, inconsolable. »
(…)


https://www.huffingtonpost.fr/politique/video/obseques-de-gerard-collomb-emmanuel-macron-salue-le-lion-qui-l-a-accompagne-des-2016_226391.html

julian louis a dit…

Cherchez sur internet Philippe Layat agriculteur exproprié à Lyon pour faire une route d'accès à un parking desservant le nouveau stade offert généreusement par la collectivité publique dirigé par Collomb à un privé Aulas propriétaire de l'OL.
On l'a même fait tabasser par des "barbouzes"..
Collomb, enterré dans une Cathédrale ? une Honte !
La Démocratie dont on se rengorge à longueur de journée ,c'est une chasse privée réservée à une "élite "
En Grèce où ce concept a émergé , les femmes ne votaient pas , les esclaves non plus .. seuls les "notables " avaient ce droit , rien de nouveau sous le soleil malgré le camouflage ...

Anonyme a dit…

https://www.francetvinfo.fr/politique/parlement-francais/assemblee-nationale/altercation-en-commission-a-l-assemblee-il-faut-dedramatiser-les-faits-selon-la-deputee-lfi-clemence-guette_6217287.html

Anonyme a dit…

Pour appuyer tes propos Louis...

"Le tribunal administratif lyonnais a balayé un à un les arguments de l'agriculteur et de son avocate, Me Florence Cusin-Rollet. Traverser le boviduc dans la boue provoquerait des maladies aux moutons ? "La traversée du tunnel n’est que de courte durée et la présence de boue n’est pas permanente, ce qui ne permet pas de caractériser un risque sérieux de développement d’une maladie du bétail". Son tracteur racle la chaussée à cause de l'aménagement ? Les difficultés ne sont pas suffisamment précises. Le grillage aurait été mal posé ? Les photos fournises sont insuffisantes pour s'en rendre compte.

Philippe Layat a longtemps alerté la presse et multiplier les actions contre son expropriation puis les conditions de cette dernière. Rares ont été les combats remportés par celui qui fut le symbole de l'opposition au grand projet porté par Jean-Michel Aulas et Gérard Collomb, devenu aujourd'hui le Groupama Stadium."


https://www.lyonmag.com/article/119784/echec-du-recours-de-philippe-layat-agriculteur-exprorie-pour-le-grand-stade-de-l-ol-sur-les-amenagements-de-la-metropole-de-lyon

*****

Collomb/Aulas : du stade des Lumières à la holding de Groupama...

"Le Parc Olympique lyonnais, anciennement Stade des Lumières, notamment avant son inauguration, et appelé Groupama Stadium par contrat de naming avec Groupama pour la période 2017-2025[N 1], désigne un stade de football ainsi qu'un complexe de sports et de loisirs comprenant ce stade situés à Décines-Charpieu, dans l'est de l'agglomération lyonnaise. Cet ensemble est la propriété de la société OL Groupe, la holding dont fait partie le club de football de l'Olympique lyonnais. Le projet de construction date de 2007, le stade étant ensuite construit de 2012 à 2015 puis inauguré en 2016."
(…)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Parc_Olympique_lyonnais

Anonyme a dit…

Malgré la poursuite des travaux de l’A69, l’économiste Geneviève Azam assure que rien n’est joué et que la lutte doit continuer. « Ce n’est plus seulement une question d’autoroute, mais un refus de son monde », pense-t-elle.

"L’économiste et ancienne porte-parole d’Attac Geneviève Azam est engagée dans la lutte contre l’autoroute A69. Pour elle, rien n’est joué et si la victoire au bout n’est pas assurée, le combat vaut la peine d’être poursuivi. « La lutte permet de faire corps » et de « combattre un sentiment d’impuissance », dit-elle. Une prochaine mobilisation aura lieu le 9 décembre prochain dans le Tarn contre le béton et le bitume. Le collectif La Voie est libre vient également de lancer un appel au boycott des produits des laboratoires Pierre Fabre, une entreprise à l’origine du projet d’autoroute."
.../...


https://reporterre.net/Continuer-de-s-engager-contre-l-A69-c-est-retrouver-de-la-joie