jeudi 3 mai 2018

Les gendarmes ont déversé une quantité record de grenades sur la Zad de Notre-Dame-des-Landes

Les gendarmes ont déversé une quantité record de grenades sur la Zad de Notre-Dame-des-Landes

Les gendarmes ont déversé une quantité record de grenades sur la Zad de Notre-Dame-des-Landes

Depuis le début de l'évacuation de Notre-Dames-des-Landes, lundi 9 avril 2018, plus de 11.000 grenades ont déjà été tirées par les gendarmes mobiles. Selon les informations d'Europe 1, ce sont près de 8.000 grenades lacrymogènes et de plus de 3.000 grenades assourdissantes qui sont tombées sur la Zad en un peu plus d'une semaine. Propulsées à l'aide de lanceurs Cougar et Chouca, ces munitions peuvent parcourir jusqu'à 50 à 200 mètres avant d'atterrir. Dans certaines situations, les lacrymogènes ont bouché la vue des gendarmes mobiles, qui se sont retrouvés à tirer en aveugle à travers leurs propres gaz.

Dans le camp des zadistes, on recense plus de 272 blessés atteints par cette pluie de projectiles, même si l'équipe médicale de la Zad préfère rester vague sur le chiffre exact et les spécificités des blessures pour éviter que les opposants ne soient interpellés à l'hôpital, comme ce fut le cas en 2012. Du côté des forces de l'ordre, au moins 77 gendarmes ont eux aussi été blessés, dont 4 par l'une de leurs propres grenades au deuxième jour des expulsions.

Une journaliste de Reporterre, Marie Astier, et deux de Libération ont eux aussi été touchés au cours de leurs reportages. Les blessures recensées vont de l'irritation des voies respiratoires par les gaz lacrymogènes aux hématomes en passant aux petits éclats brûlants de grenades pénétrant les chairs jusqu'à celle, plus grave, d'un morceau de grenade de deux centimètres responsable d'une infection.

[Illustration : Tweet avec photo montrant les petits éclats de grenades qui pénètrent dans la peau.]

Voici les éclat qui criblent celles ou ceux qui se trouvent dans le champ d'une grenade comme on nous balance à par salves à chaque charges et notamment en tir tendu ce qui est interdit ! C'est petits éclats brûlants pénètre profondément et sont difficile à extraire.

— Street Zad Actionmédic (@ZadStreet)

Nombre de ces projectiles ont dépassé leur date de péremption

La semaine dernière, les petites mains de Notre-Dames-des-Landes ont récupéré des restes de grenades lancées par les gendarmes pour témoigner du pilonnage subi. Les projectiles sont rassemblés en tas, et chaque tas est recouvert d'une bâche sur laquelle est inscrite les spécificités des engins recueillis. On y retrouve des bombes de désencerclement, des bombes assourdissantes, des cartouches de gaz lacrymogène, des cartouches de fumigènes… Ces produits sont fabriqués par les entreprises françaises Nobel Sport et SAE Alsetex.

Selon le collectif Désarmons-les !, ce sont justement les modèles de grenades à « effets combinés » GLI F4 de SAE Alsetec qui ont été massivement utilisés lors des évacuations. Des projectiles qui émettent par « détonation un effet sonore et de choc très intense en libérant instantanément du CS [gaz lacrymogène] pulvérulent », vante son concepteur, qui met en avant les « effets psychologiques engendrés par l'effet sonore (165 db mesurés à 5 mètres et 160 db mesurés à 10 m) » ainsi que « l'onde de choc » produite pour « déstabiliser les manifestants dans des situations particulièrement difficiles ». Une grenade dont « l'usage était déjà remis en question dans un rapport commun de l'inspection de la gendarmerie et de la police à la suite de la mort de Rémi Fraisse en 2014, rappelle Désarmons-les !. Contestées pour les blessures graves qu'elles occasionnent, les GLI F4 sont censées être remplacées peu à peu par les GM2L [un modèle plus récent]. »

Les niveaux sonores, en décibels (db).

Pour écouler ses stocks, la gendarmerie semble avoir misé sur une utilisation massive des grenades F4, comme en témoigne Gaspard Glanz, journaliste habitué des mouvements sociaux et des lacrymogènes : « En dix ans, j'ai dû voir une dizaine de F4 exploser par événement. Durant la semaine du 9 avril, à Notre-Dames-des-Landes, il y avait des jets de plusieurs centaines tous les jours ! Une utilisation aussi gargantuesque de cette arme, c'est inédit. »

Une stratégie d'autant plus alarmante que nombre de ces projectiles ont dépassé leur date de péremption. « En examinant les restes des grenades, on a trouvé un lot entier de grenades qui a été fabriqué en 2005, et qui était donc périmé depuis 2015, poursuit Gaspard Glanz. Le problème, c'est que certaines munitions tombent sans exploser. C'est extrêmement dangereux si quelqu'un la ramasse et qu'elle lui saute dans les mains. » Et même si les projectiles fonctionnent correctement, ils n'en restent pas moins dangereux : « Nous avons récupéré des morceaux de plastique et de métal tout autour de chaque impact sur le sol. Quand elle explose, la coque supérieure de la grenade éclate complètement et se répand dans un périmètre de 5 à 10 mètres. Les tirs comme ceux-là, on a vu ce que ça a fait à Sivens. C'est un miracle qu'il n'y ait pas un mort sur les 3.000 assourdissantes lancées. »

« Il n'est pas interdit de porter des masques à gaz en manifestation » 

Mais, les effets à long terme des gaz CS contenus dans les grenades utilisées à Notre-Dame-des-Landes restent eux aussi un vecteur d'inquiétude. Bien que décrite comme une arme non létale, des études ont élevé de sérieux doutes sur la classification du mélange produit : les gaz CS peuvent en effet causer de sérieux dommages pulmonaires et abîmer le cœur, les reins et le foie des personnes qui en font les frais. Si une exposition unique provoque des larmoiements, une irritation de l'appareil respiratoire et une sensation de brûlure sur la peau, une exposition chronique mène, elle, à des vomissements, des nausées, des maux de crâne et des insomnies qui peuvent durer plusieurs semaines. « Dans le cas de Notre-Dame-des-Landes, les gens qui restent sur place sont inondés de ces produits, qui se collent à la peau, à leurs vêtements. Il y a un effet de saturation, on commence à voir des cas de plus en plus inquiétants », évoque un membre de la Zad.

Sur la Zad de Notre-Dame-des-Landes, samedi 14 avril.

Point positif, le collectif Désarmons-les ! tient à souligner que les forces de l'ordre n'ont pas eu recours à des grenades « incapacitantes », comme certaines personnes l'ont écrit sur les réseaux sociaux. Pas plus qu'aux grenades contenant du gaz CN et de l'adamsite, un gaz chimique utilisé autrefois comme arme chimique et anti émeute, qui ne sont plus utilisées aujourd'hui.

En cas d'exposition aux gaz lacrymogènes, « le premier réflexe est de rester calme, conseille Gaspard Glanz, il faut retenir sa respiration, attendre que le gaz se dissipe et s'écarter de la zone quelques minutes. Si quelqu'un panique, il va respirer à pleins poumons et empirer la situation. » Il est également recommandé en cas de contamination de ne pas se frotter les yeux, au risque d'aggraver la situation, mais de les rincer à l'aide d'un sérum physiologique. Les vêtements touchés doivent eux être manipulés avec attention, en raison des résidus de gaz toujours présents à leur surface. Et quitte à être présent dans une zone où les grenades risquent de voler, le journaliste rappelle « qu'il n'est pas interdit de porter des masques à gaz en manifestation ».

Mais en pleine période de nidification, pas sûre que les oiseaux du bocage nantais aient prévu d'enfiler le leur, selon le journaliste : « La zone locale aussi a dû en pâtir avec le nombre de munitions lancées. C'est quelque chose qu'il faudra surveiller de près. »


« L'HYBRIDATION ENTRE MAINTIEN DE L'ORDRE ET OPÉRATION DE GUERRE, C'EST LA MILITARISATION DE LA POLICE »

L'Assemblée des blessés par la police, un collectif, a publié un document, intitulé Que fait la police ? où elle rassemble les faits concernant les armes utilisées par la gendarmerie lors de l'opération sur la Zad de Notre-Dame-des-Landes du 9 au 18 avril : selon ce collectif, « le dispositif mis en place sur la zone illustre de façon terrible l'hybridation entre maintien de l'ordre et opération de guerre, ce que nous appelons la militarisation de la police ».

  • Télécharger « Que fait la police ? » :
    Que fait la police ? par l'Assemblée des blessés

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La Relève et La Peste

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Le gouvernement français ouvre le marché de l'huile de palme à Total

2 mai 2018 / par Laurie Debove

Les Amis de la Terre et Greenpeace France tirent la sonnette d'alarme : le gouvernement français vient d'approuver le plan d'approvisionnement de Total pour sa bio-raffinerie géante de La Mède. Ce projet prévoit d'importer 550 000 tonnes d'huile de palme chaque année, une catastrophe écologique.

Trois fois plus d'huile de palme que les industries agroalimentaires françaises

La nouvelle est parvenue aux ONG grâce à leur découverte d'un document émis par la préfecture des Bouches-du-Rhône détaillant le plan de Total. Avec 550 000 tonnes d'huiles de palme importées par an pour produire du biodiesel, Greenpeace estime que ce projet ferait bondir les importations françaises d'huile de palme d'environ 64 % !

Les consommateurs connaissent bien la présence d'huile de palme dans certains produits comme le Nutella. Le projet de Total utiliserait trois fois plus d'huile de palme que les 136 000 tonnes d'huile de palme utilisées par l'industrie agroalimentaire française chaque année. Osons Causer détaille les conséquences de cette importation dans un chiffre qui paraît loufoque tellement il est gros : 550 000 tonnes d'huile de palme représentent 4,3 milliards de grands pots de Nutella.

Crédit : Chaîne Youtube Osons Causer

Alors qu'Emmanuel Macron adressait un défi bravache à Donald Trump lors de sa visite aux Etats-Unis, on peut ici observer un antagonisme criant entre les paroles du Président de la République et les accords passés avec Total.

« Si Emmanuel Macron entend être un véritable leader de la lutte contre le changement climatique, il est grand temps que l'Etat cesse de soutenir les agrocarburants de première génération, tant sur les plans législatif et fiscal que diplomatique. Quand la France décide d'ouvrir les vannes de l'huile de palme, les grands discours sur la protection du climat sonnent creux », analyse Clément Sénéchal, chargé de campagne Forêts à Greenpeace France.

Biodiesel à l'huile de palme : mort des forêts tropicales et émissions de gaz à effet de serre

Le gouvernement français exige que l'huile de palme utilisée par Total soit certifiée, notamment RSPO. Seulement, cette certification est très critiquée par de nombreuses ONG, dont Greenpeace, en raison du manque de rigueur dans les critères appliqués pour obtenir ce label et d'une mauvaise transparence dans sa gestion. De plus, parmi les certifications demandées, aucune d'entre elles ne garantit l'absence d'impacts directs ou indirects sur les forêts tropicales, principales zones de production de l'huile de palme. Afin d'en produire, les exploitants rasent des hectares de forêt aussi grands que des pays ! Entre 1990 et 2015, une surface forestière faisant la même taille que le Royaume-Uni a été rasée en Indonésie !

Alors que les agrocarburants sont présentés comme une solution idéale pour réduire l'impact du secteur des transports en terme d'émissions de gaz à effet de serre, ce biodiesel à l'huile de palme est en fait beaucoup plus nocif que le diesel traditionnel ! Une étude révèle que parmi tous les biodiesels fabriqués avec de l'huile végétale, celui à l'huile de palme est le plus polluant en terme d'émissions de CO2. En raison de la déforestation des incroyables poumons verts de la planète que sont les forêts tropicales, le biodiesel de Total serait responsable de trois fois plus d'émissions de gaz à effet de serre que les carburants fossiles. 

Greenpeace dénonce un « marché artificiel » des agrocarburants, développé à une échelle industrielle sous le jeu d'objectifs législatifs contraignants décidés au niveau européen et national, et nourri par des milliards d'euros de subventions, d'exonération fiscales et d'aides publiques. En 2012, la Cour des comptes avait même parlé d'une véritable « niche fiscale » et d' « effets d'aubaine » créés par ces réglementations. Ces transformations se sont faites à l'insu des consommateurs qui ne savent pas souvent que le carburant distribué à la pompe des stations essence est de plus en plus composé d'huile végétale.

Alors que Nicolas Hulot, dans son Plan climat, avait annoncé l'interdiction d'utiliser l'huile de palme dans les carburants, la France fait aujourd'hui machine arrière. Au même moment, le Parlement européen et la Commission européenne annoncent leur intention d'en finir avec les agrocarburants de première génération, notamment le biodiesel à l'huile de palme. La France portera-t-elle la responsabilité de la disparition pure et simple des forêts tropicales en s'opposant à cette volonté européenne ? Une consultation publique doit bientôt être lancée.

Crédit Poto : BAY ISMOYO / AFP

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2 mai 2018 / par Laurie Debove Partager

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