"Les consultants de McKinsey sont si discrets qu’ils réussissent à passer presque inaperçus dans les structures où ils officient. A la Caisse nationale d’assurance-vieillesse (CNAV), une large partie du personnel ignorait, jusqu’à une date récente, que la filiale tricolore de la firme américaine s’était vu confier une mission dans cette institution. Le pot aux roses a été découvert à la faveur des travaux de la commission d’enquête sénatoriale qui a rendu un rapport, le 17 mars, sur « l’influence croissante » de ce type de prestataires. Jeudi 24 mars, des syndicalistes ont interpellé la direction de la CNAV à ce sujet durant une réunion du comité social et économique – l’instance de représentation des salariés." (...)
"Depuis quelques mois, un scandale gonfle et se précise. L’Etat français aurait, via le gouvernement d’Emmanuel Macron, payé au moins 1 milliard d’euros par an à des cabinets de conseils pour concevoir sa politique, en doublon de l’administration publique et pour des missions dont l’intérêt n’est pas facile à saisir (et le mot est faible). De l’argent public balancé par les fenêtres ? Oui, et principalement en faveur d’une entreprise, McKinsey, dont on a appris la semaine dernière qu’elle ne payait absolument aucun euro d’impôt en France. L’homme en charge de la passation de contrat de ce cabinet de conseil avec l’Etat n’est autre qu’un ami du président, Karim Tadjeddine, qui partage avec lui une vision de l’Etat « en mode start up ». Tout comprendre de ce scandale d’Etat, de cette gabegie au service des copains, qui entraînerait la chute du gouvernement… si nous vivions en démocratie." (...)
"Les consultants ce sont des gens qui ont le talent de surjouer la compétence et qui parviennent à impressionner leurs clients en les noyant sous un jargon technique et des schémas complexes." (...)
"Cette façon de facturer fort cher des travaux de piètre qualité nous a été rapportée il y a deux ans par un consultant d’un des “Big Four” intervenant auprès de l’Etat, Joan. Voici ce qu’il nous racontait, dans un témoignage édifiant (à lire en intégralité ici) :
“En théorie, nos travaux devaient être solides et les prix justifiés : experts ayant plus de 15 ans de bouteille, expériences reconnues et savoir-faire prouvés et éprouvés d’un Big Four pour une qualité “assurée”. Par définition, un Big Four étant présent partout dans le monde, il dispose d’expériences et d’experts dans virtuellement tous domaines. En pratique, mon service avait une exigence de marge de 40 % : si nous avions un “projet” à 100 000 €, celui-ci ne devait coûter que 60 0000 € à réaliser à l’entreprise en coûts de personnels, les 40 000 € disparaissant dans le biz dev, les frais généraux et, surtout, les poches des actionnaires.”
Les honnêtes citoyens qui ont toujours peur de payer des profs à « se la couler douce », que pensent-ils du fait que Macron et ses amis payent un salaire mensuel par jour à des consultants chargés de faire jouer des fonctionnaires aux Lego pour remplir les poches de quelques actionnaires ?" (...)
"Elle a fait partie des premiers à alerter sur le sujet. Dès 2012, Claude Revel, énarque et entrepreneuse, s'inquiétait dans La France, un pays sous influences ? (Vuibert) de l'emprise croissante des cabinets de conseil sur la décision politique. Dix ans plus tard, cette pratique est devenue prédominante. Une commission d'enquête du Sénat a décrit, le 17 mars dernier, un "phénomène tentaculaire" et un recours "devenu un réflexe", notamment dans la gestion du Covid. En 2021, les dépenses de conseil extérieur des ministères ont atteint 893,9 millions d'euros, plus du double de 2018, quand elles atteignaient déjà 379,1 millions d'euros." (...)
"En 2021, Jean Tirole et Olivier Blanchard, professeur au MIT, ont ainsi rendu un rapport au gouvernement sur les grands défis économiques : la lutte contre le réchauffement climatique, la réduction des inégalités, et l’adaptation au vieillissement de la population. Comme le souligne le Nouvel Obs, le rapport des économistes, demandé par Emmanuel Macron, fait référence à quatorze reprises au cabinet McKinsey.
Florence Jany-Catrice, Présidente de l’Association française d’économie politique, évoquera dans une tribune du Monde "une vision libérale et productiviste de la science économique "mainstream"" marquée par un "entre-soi". Des critiques d'autant plus fortes que le partenariat entre TSE et McKinsey a été révélé.
"Je comprends qu'il puisse y avoir des interrogations, estime Christian Gollier, l'un des principaux auteurs du rapport Tirole-Blanchard. Mais nos chercheurs de TSE qui ont collaboré avec McKinsey n'ont absolument rien à voir avec le rapport Tirole-Blanchard. Pour les nombreuses références au cabinet de conseil américain dans notre rapport, cela n'a rien d'étonnant. McKinsey produit des études de qualité et tout n'est pas à mettre à la poubelle."
Certains n'y verront qu'une confirmation de l'influence "tentaculaire" des cabinets de conseil sur les politiques publiques, dans un monde bâti autour de la "religion du capitalisme". Christian Gollier lui assure qu'aucune autre collaboration de ce genre n'a été engagée avec son établissement et qu'on ne l'y "reprendra plus"."
5 commentaires:
"Le député insoumis, chiffre à l'appui, a demandé des explications au ministre de la Santé sur le cabinet de conseil McKinsey."
(...)
https://www.rtl.fr/actu/politique/on-est-en-direct-adrien-quatennens-interpelle-olivier-veran-sur-le-dossier-mckinsey-7900138137
"Les consultants de McKinsey sont si discrets qu’ils réussissent à passer presque inaperçus dans les structures où ils officient. A la Caisse nationale d’assurance-vieillesse (CNAV), une large partie du personnel ignorait, jusqu’à une date récente, que la filiale tricolore de la firme américaine s’était vu confier une mission dans cette institution. Le pot aux roses a été découvert à la faveur des travaux de la commission d’enquête sénatoriale qui a rendu un rapport, le 17 mars, sur « l’influence croissante » de ce type de prestataires. Jeudi 24 mars, des syndicalistes ont interpellé la direction de la CNAV à ce sujet durant une réunion du comité social et économique – l’instance de représentation des salariés."
(...)
https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/03/26/cabinets-de-conseil-la-mission-a-957-000-euros-de-mckinsey-a-la-caisse-nationale-d-assurance-vieillesse_6119270_823448.html
"Depuis quelques mois, un scandale gonfle et se précise. L’Etat français aurait, via le gouvernement d’Emmanuel Macron, payé au moins 1 milliard d’euros par an à des cabinets de conseils pour concevoir sa politique, en doublon de l’administration publique et pour des missions dont l’intérêt n’est pas facile à saisir (et le mot est faible). De l’argent public balancé par les fenêtres ? Oui, et principalement en faveur d’une entreprise, McKinsey, dont on a appris la semaine dernière qu’elle ne payait absolument aucun euro d’impôt en France. L’homme en charge de la passation de contrat de ce cabinet de conseil avec l’Etat n’est autre qu’un ami du président, Karim Tadjeddine, qui partage avec lui une vision de l’Etat « en mode start up ». Tout comprendre de ce scandale d’Etat, de cette gabegie au service des copains, qui entraînerait la chute du gouvernement… si nous vivions en démocratie."
(...)
"Les consultants ce sont des gens qui ont le talent de surjouer la compétence et qui parviennent à impressionner leurs clients en les noyant sous un jargon technique et des schémas complexes."
(...)
"Cette façon de facturer fort cher des travaux de piètre qualité nous a été rapportée il y a deux ans par un consultant d’un des “Big Four” intervenant auprès de l’Etat, Joan. Voici ce qu’il nous racontait, dans un témoignage édifiant (à lire en intégralité ici) :
“En théorie, nos travaux devaient être solides et les prix justifiés : experts ayant plus de 15 ans de bouteille, expériences reconnues et savoir-faire prouvés et éprouvés d’un Big Four pour une qualité “assurée”. Par définition, un Big Four étant présent partout dans le monde, il dispose d’expériences et d’experts dans virtuellement tous domaines. En pratique, mon service avait une exigence de marge de 40 % : si nous avions un “projet” à 100 000 €, celui-ci ne devait coûter que 60 0000 € à réaliser à l’entreprise en coûts de personnels, les 40 000 € disparaissant dans le biz dev, les frais généraux et, surtout, les poches des actionnaires.”
Les honnêtes citoyens qui ont toujours peur de payer des profs à « se la couler douce », que pensent-ils du fait que Macron et ses amis payent un salaire mensuel par jour à des consultants chargés de faire jouer des fonctionnaires aux Lego pour remplir les poches de quelques actionnaires ?"
(...)
https://www.frustrationmagazine.fr/scandale-mckinsey/
"Elle a fait partie des premiers à alerter sur le sujet. Dès 2012, Claude Revel, énarque et entrepreneuse, s'inquiétait dans La France, un pays sous influences ? (Vuibert) de l'emprise croissante des cabinets de conseil sur la décision politique. Dix ans plus tard, cette pratique est devenue prédominante. Une commission d'enquête du Sénat a décrit, le 17 mars dernier, un "phénomène tentaculaire" et un recours "devenu un réflexe", notamment dans la gestion du Covid. En 2021, les dépenses de conseil extérieur des ministères ont atteint 893,9 millions d'euros, plus du double de 2018, quand elles atteignaient déjà 379,1 millions d'euros."
(...)
https://www.lexpress.fr/actualite/societe/polemique-mckinsey-le-recours-incessant-aux-cabinets-de-conseil-est-ideologique_2170729.html
Entre-soi "libéral et productiviste"
"En 2021, Jean Tirole et Olivier Blanchard, professeur au MIT, ont ainsi rendu un rapport au gouvernement sur les grands défis économiques : la lutte contre le réchauffement climatique, la réduction des inégalités, et l’adaptation au vieillissement de la population. Comme le souligne le Nouvel Obs, le rapport des économistes, demandé par Emmanuel Macron, fait référence à quatorze reprises au cabinet McKinsey.
Florence Jany-Catrice, Présidente de l’Association française d’économie politique, évoquera dans une tribune du Monde "une vision libérale et productiviste de la science économique "mainstream"" marquée par un "entre-soi". Des critiques d'autant plus fortes que le partenariat entre TSE et McKinsey a été révélé.
"Je comprends qu'il puisse y avoir des interrogations, estime Christian Gollier, l'un des principaux auteurs du rapport Tirole-Blanchard. Mais nos chercheurs de TSE qui ont collaboré avec McKinsey n'ont absolument rien à voir avec le rapport Tirole-Blanchard. Pour les nombreuses références au cabinet de conseil américain dans notre rapport, cela n'a rien d'étonnant. McKinsey produit des études de qualité et tout n'est pas à mettre à la poubelle."
Certains n'y verront qu'une confirmation de l'influence "tentaculaire" des cabinets de conseil sur les politiques publiques, dans un monde bâti autour de la "religion du capitalisme". Christian Gollier lui assure qu'aucune autre collaboration de ce genre n'a été engagée avec son établissement et qu'on ne l'y "reprendra plus"."
https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/haute-garonne/toulouse/mckinsey-l-embarrassante-collaboration-de-la-toulouse-school-of-economics-avec-le-cabinet-de-conseil-americain-2515044.html
Enregistrer un commentaire