jeudi 13 juin 2013

Petite contribution de réflexion après Le Teil


J’étais très curieux du village des possibles que la pluie a contribué à rendre impossible. Donc à suivre.
Ainsi la semaine s’est réduite au week-end de la démocratie réelle à venir, dans une atmosphère souvent chaleureuse et assez humaine, tenu compte de l’amère évidence que la communauté n’existe pas encore et qu’il n’y a que l’illusion d’être ensemble collectivement.
Comment cela pourrait-il changer ? Voilà la question toujours implicite tout le long du rencontre mais souvent tue, au delà des échanges divers, mis en œuvre, avec passion confuse mais sincère, par les citoyens de nulle part que nous sommes.
Tout rencontre spontané laisse sortir les quelques affinités mais surtout les différences entre les individus. C’était le cas à Le Teil, grâce au gros et remarquable travail de préparation de Bernard et de ses quelques amis passionnés de OPDLM qui a constitué le don d’un espace/temps où chacun a pu essayer d’être soi même.
Identités et différences émergent au niveau du comportement autant qu’au niveau de la conscience car les vieux clivages sont loin d’être dépassés (aussi peu d’ailleurs que les frustrations personnelles qui les alimentent). D’ailleurs, les courbatures idéologiques douloureuses augmentent au fur et à mesure que le vieux monde est toujours là, et même plus que jamais, hélas. Derrière chaque militant marche toujours une quelque morale, pas nécessairement cohérente, qui voit en toute négation un reniement, en toute prise de parole une prise de pouvoir.
Quand rien ne change jamais, la moralisation bureaucratique des autres est la dernière activité possible pour cacher notre impuissance (ou manque de passion véritable) à changer le monde. Ainsi les limites inévitables des individus deviennent souvent les boucs émissaires d’un collectivisme de bistrot qui séduit les quelques militants mondains venant en touriste à consommer du discours alternatif.
Il y a donc, dans la faune que nous sommes, le beau parleur narcissique et le bobo à l’affût pour ne pas se laisser faire par aucun discours trop librement étalé. Dénoncer les hiérarchies et le pouvoir est absolument prioritaire. Comment ne pas être solidaires, donc, avec une telle sensibilité même si elle se traduit souvent en une hargne bureaucratique à mesurer le nombre de mots et le temps de parole d’autrui ? Malheureusement, celui qui, au nom de la démocratie, se proclame donneur de parole, finit presque toujours pour en profiter et se donner le droit de parler à son aise pendant qu’il mesure la parole des autres. Il faudra peut-être arriver à régler cette question si importante différemment : que chacun étale ses savoir ou présumés tels en liberté, sans la guillotine d’un peuple frustré qui se contente de partager sa frustration sans jamais dénoncer l’impuissance qui le frustre.
La vraie limite sociale évidente de ceux qui parlent beaucoup c’est d’empêcher les autres d’en faire autant, mais l’égalité ce serait donc que chacun parle à sa guise et non pas que tous parlent si peu. Il n’y a pas d’égalité sans liberté ni sans une protection accrue des différences visibles. Il nous faut du temps, du vrai temps libre des contraintes d’esclaves, et bien sur le droit absolu de rappeler aux parleurs, à chaque instant, le côté névrotique de la prise de parole, l’éventuel excès disharmonique de leur expression et notre envie d’en faire autant.
D’un côté l’occupation narcissique du territoire, de l’autre l’espace octroyé à quelques catégories choisies, voila deux erreurs spéculaires à corriger.
Obliger les jeunes, les femmes ou les pandas à s’exprimer relève du paternalisme de prof ou de psychologue et non pas de la liberté démocratique ou de l’égalité fraternelle.
Pour favoriser l’expression de chacun, il faudrait plutôt laisser agir librement les affinités électives qui tendent spontanément à diriger chacun dans le collectif le plus attirant. J’ai apprécié, par exemple, dans l’atelier que j’étais appelé à animer, l’absence d’un certain nombre d’individus qui ne trouvent probablement pas sympathique ce prétentieux transalpin venu faire la leçon, cette espèce de philosophe marginal qui parle beaucoup.
La magie fait que souvent une antipathie légère se révèle aussi réciproque que les coups de foudre et c’est très bien ainsi. Cela n’empêche pas de boire un pot ensemble, ou parfois même de communiquer un peu. On peut aimer un peu tout le monde, mais pas faire l’amour avec tout le monde, même pas en théorie.
Donc, que chaque jouissance cherche et trouve son interlocuteur possible, en théorie comme en pratique. L’ensemble des différences étalées fera un monde nouveau selon la sensibilité de Fourier et non pas de Staline.
La peur est effectivement partout, mais elle est un symptôme et non pas une justification. L’insécurité est un sentiment phobique. Il faut donc la traiter comme un alibi symptomatique et non pas comme une juste revendication ou une sage précaution.
Ainsi on dépassera, peut-être, le jeu hypnotique et sadomaso qui porte à se soulager de façon solitaire en accusant tous les autres de sa solitude. Nous sommes seuls tous ensembles et on se réunira véritablement le jour où on satisfera ensemble quelques désirs plutôt que revendiquer obsessionnellement, comme des syndicalistes du quotidien, des tragiques besoins culpabilisants.
De ma part, la seule partie que je peux assumer, je dis : assez des intellectualismes confusionnistes qui pour se réapproprier des mots se revendiquent du populisme et du nationalisme. Pourquoi, alors, ne pas se réapproprier aussi du fascisme et du racisme ?
Tolérance pour tous, dépassement des idéologies, bien sur, mais au-delà des droites et des gauches, il reste toujours nécessaire de choisir son camp, camarades ! Donc je partage encore avec l’IS cette devise pratique : pas de dialogue avec les provocateurs, pas de dialogue avec les cons ! (Je n’oublie pas, néanmoins, que nous sommes tous le con de quelqu’un d’autre, d’où l’importance des affinités électives).
Assez de thérapies de laboratoire pour soigner l’économie, alors qu’il s’agit de sauver les hommes de la pathologie économique.
La vraie réappropriation des mots c’est de leur faire dire ce que leur étymologie laisse entendre. L’économie est la bonne gestion de la « maison », donc une économie domestique. Un point c’est tout.
Un populiste est un démagogue manipulateur du peuple et non pas un ami du peuple. La cause du peuple est celle du peuple lui-même et non pas celle de ses pasteurs autoproclamés.
Un nationaliste n’est pas un patriote d’une nation vivante, mais un autoritaire mettant sa nation idéologique devant celles d’autrui qui ne reconnaît même pas.

Assez aussi des quelques touristes de la révolution qui participent aux rencontres comme à un festival ciné. Ils sont émus aux larmes après un film, comme si les grecs et les Mapuche n’existaient pas sinon dans la projection.
Si on pense que la révolution est en Grèce, c’est là qu’il faut aller voir, sinon on pourrait plutôt intervenir ici et maintenant dans notre vie quotidienne qui ne manque pas non plus de révolutions nécessaires dans nos affectivités, notre activité, notre exclusions intimes et sociales, etc. Cela est une forme de solidarité avec les autres moins spectaculaire à mes yeux.
Les poètes bureaucrates adorent toujours le calcul obsessionnel des doigts qui se lèvent vers le ciel car cela est la meilleure manière d’ignorer la lune qu’on a honte d’avoir raté tout le long d’une vie perdue à la gagner sans broncher.
Que cela soit à propos d’un discours, d’une personne ou d’un livre, les suiveurs éternels d’une vérité indiscutable et changeante comme les idéologies, finissent toujours par être déçu des gourous qu’ils n’arrêtent pas de chercher frénétiquement. Tant mieux, mais quand arrêteront-ils de suivre avant et de haïr ensuite ?
Tout cela n’a plus de sens car plus rien de l’ancien monde hiérarchique ne peut participer au dépassement nécessaire de la société du spectacle.

Sans la prétention de tout comprendre ou dire, mes mots expriment une bonne partie de mon sentiment.

Avec ma sincère amitié,

Sergio Ghirardi


P.S. Sorry for my french, I’m italian !

3 commentaires:

Anonyme a dit…

"Malheureusement, celui qui, au nom de la démocratie, se proclame donneur de parole, finit presque toujours pour en profiter et se donner le droit de parler à son aise pendant qu’il mesure la parole des autres." Bien vu Sergio ! J'en connais des comme ça. Ils ou elles sont très agaçants !

Anonyme a dit…

De quoi qu'on cause ? J'ai dû louper quelque chose.

Anonyme a dit…

C'est pas le tout, mais si Tapie est obligé de rendre l'argent que les contribuables lui ont versé ? Comment va-t-il faire ? ... Il n'a pas tout gardé pour lui, c'est plus que probable ? Le pauvre, quelle misère ! Et dire qui y-en a qui touche le RSA sans rien faire, des chômeurs qui veulent pas travailler, des pauvres qui veulent plus se loger, des jeunes qui veulent être riches, des bébés qui savent rien faire, des femmes qui veulent la place des mecs, des étrangers qui veulent venir nous prendre nos places au soleil, finalement tous des envieux !