vendredi 6 juillet 2018

Autolib’-Bolloré : nouveau feuilleton du capitalisme de connivence à la française | Contrepoints

Autolib'-Bolloré : nouveau feuilleton du capitalisme de connivence à la française | Contrepoints

Autolib'-Bolloré : nouveau feuilleton du capitalisme de connivence à la française

Par Jonathan Frickert.

Le 21 juin dernier, le syndicat mixte gérant les délégations de service public Autolib' et Velib' a décidé de résilier le contrat avec le groupe Bolloré pour la gestion du service d'autopartage de la capitale, le titulaire de la délégation ayant demandé à la municipalité de financer son déficit d'exploitation.

Cessant son activité, nombreux sont les concurrents qui se sont rués au portillon. L'entreprise PSA, dès ce mardi, a proposé de mettre en place un nouveau service, par la voix d'un certain Thierry Bolloré, cousin de Vincent.

Alors que les services de mobilité fourmillent dans la principale ville française, l'autopartage a connu une forte expansion ces dix dernières années, marquées par la prise de conscience environnementale et les politiques de désengorgement des centres urbains. Destiné à mettre au service du public un parc automobile, aujourd'hui généralement électrique afin de satisfaire des impératifs environnementaux, ce type de services existe pourtant depuis plusieurs dizaines d'années. Or, beaucoup d'exploitations chapeautées par des collectivités ne connaissent pas la croissance qu'il s'agirait d'attendre de ce nouveau modèle économique

L'occasion de comprendre ce qui pèche tant dans ce secteur et, surtout, de constater une nouvelle fois l'incapacité de la sphère publique à gérer convenablement une activité pourtant en pleine croissance.

De bonnes intentions aux prises avec la concurrence

Le principe de l'Autolib' a été proposé lors de la campagne pour les élections municipales de 2008, incluant dès le départ plus de 80 communes de la couronne parisienne. Bertrand Delanoë, alors futur maire, proposait un fonctionnement sous forme de délégation de service public.

Courant 2009 est créé le syndicat mixte qui pilote encore aujourd'hui le projet. On nous parle régulièrement de mille-feuille territorial. Plutôt que d'attaquer les collectivités, il serait bon de noter une maladie bien française : la foison d'agences, de services, de sociétés d'économie mixte et bien sûr de syndicats mixtes. Voici un mille-feuille dans le mille-feuille qui montrera, dans notre cas d'espèce, encore une fois son inadaptation.

La même année est lancé un appel d'offres auquel 6 candidats auront répondu, donc un groupement incluant la SNCF et la RATP, une candidature de La Poste et une candidature du groupe Bolloré. L'année suivante, la liste est réduite à 4 candidatures avec lesquelles sont menées des négociations. En décembre 2010, le groupe Bolloré remporte le marché, avec une mise en service progressive à partir de 2011.

Pourtant, très vite, l'opérateur montre ses limites. Ne parvenant pas à rentrer dans ses frais, la municipalité estime à 293 millions d'euros le déficit cumulé à l'horizon 2013. Le projet, devant être rentable à partir de 50 000 usagers, souffre de plusieurs maux, entraînant rupture du contrat de délégation fin juin de cette année.

Outre le très mauvais entretien des véhicules, le réseau parisien de transports alternatifs est déjà largement saturé, rendant impossible le respect des objectifs fixés. Entre Velib', scooters en libre-service et VTC, faisant déjà concurrence aux modes classiques que sont le métro, le tramway et le taxi, le Parisien a déjà une ribambelle d'options. Ajoutons à cela les politiques tant décriées mises en œuvre par Madame Hidalgo pour faciliter la circulation dans la capitale, et vous aurez tous les ingrédients d'un échec annoncé.

Au final, ce qui ressort de cette péripétie tient dans un simple constat de marché. L'offre de transports est déjà saturée, et il est très difficile de voir comment une demande pourrait se manifester sérieusement pour les services d'autopartage. L'objectif environnemental et urbain de la mairie de Paris se heurte à une carence de la demande sur ce créneau.

Le capitalisme de connivence à la Française

Une situation qui n'est pas sans rappeler d'autres modes de partenariat entre exploitants privés et clients publics. Les bonnes intentions ne suffisent pas à masquer la mécanique du marché sur lequel elles doivent s'exercer.

L'exemple de la Poste, société anonyme à capital 100 % public, ou d'EDF, montre une nouvelle fois ce modèle hybride d'entrée de la collectivité sur un marché.

Comme vu dans un article précédent, l'actionnaire étant un investisseur, prenant des risques financiers, ces risques peuvent entraîner une responsabilité économique. L'essence même de tout capitalisme sain repose sur la prise de risque. Le dividende est là pour récompenser cette prise de risque. C'est le principe du libéralisme : la liberté suggère la responsabilité. Dans le cas de l'État-actionnaire, la responsabilité, et donc ici le risque, est supporté par le contribuable lui-même.

De quoi rappeler le fiasco qu'a été le projet avorté d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Initié en 1963 par une délégation interministérielle dont la république gaullienne avait déjà le secret, l'objectif était de rééquilibrer le territoire, le tout dans le cadre d'un cinquième plan.

Il faudra attendre 7 ans pour voir le schéma d'aménagement, avant que la crise pétrolière et l'opposition des propriétaires locaux ne mettent le projet en sommeil jusqu'au début des années 2000.

De la même manière, on retrouve le principe des concessions autoroutières, concernant plus des 3/4 du réseau. Des concessions faites il y a 13 ans à un prix modique avec garantie de compensation du déficit d'exploitation par l'autorité concédante.

En Grande-Bretagne, si la privatisation était loin d'être une catastrophe, elle a souffert des maux habituels des marchés publics de service dans leur forme contemporaine.

Plusieurs exemples d'un système bâtard, où les désavantages des modes de gestion privés et publics s'additionnent. L'association public-privé fonctionne ainsi dans les domaines propres au service public, mais très rarement dans ce qui relève de la compétence d'une activité privée, auquel cas le contribuable sera toujours celui qui essuiera les pots cassés.

Le fonctionnement d'une économie saine suppose que le risque de faillite permanent, né de l'investissement et de la concurrence, pousse à l'innovation afin de conquérir de nouvelles parts ou de conserver celles détenues. Une question qui est au cœur du drame de l'Autolib.

Vous nous avez assez aidés !

La plupart des politiques étatiques souffrent des mêmes maux : des bonnes intentions servies par un mode de gestion inadapté à la demande qu'on tend à satisfaire. Les enjeux environnementaux, le besoin de désengorger les centres-villes, d'assurer un maillage en termes de transports ou encore un espoir de décentralisation comme pour l'aéroport mariligérien désormais avorté ne sont que les façades d'un entre-deux probablement dépassé. La sphère publique est tout simplement inadaptée au terrain économique classique, à moins de tenir à bout de bras à grand coup de subventions et donc d'impôts.

L'occasion de reprendre une phrase désormais bien connue et de dire solennellement à nos élus : par pitié, sire, surtout ne faites rien !


jeudi 5 juillet 2018

Penelope Gate : la défense de François Fillon s'écroule toujours un peu plus

Penelope Gate : la défense de François Fillon s'écroule toujours un peu plus

Penelope Gate : la défense de François Fillon s'écroule toujours un peu plus

Nouvelle défaite judiciaire pour François Fillon. Le 25 juin dernier, la Cour de cassation a anéanti un des principaux arguments juridiques de l'ex-Premier ministre dans l'affaire Penelope. Il s'agit de la fameuse théorie de la "séparation des pouvoirs" agitée par le Sarthois et ses avocats pendant la campagne présidentielle. L'idée ? Un parlementaire – ce qu'était François Fillon quand il a embauché son épouse comme collaboratrice – ne saurait être poursuivi pour détournement de fonds publics. Dans leur esprit, seuls les dépositaires de l'autorité publique, comme les maires, pourraient être inculpés.

"Cette enquête viole les principes les plus fondamentaux du droit constitutionnel", expliquait le 9 février 2017 Antonin Lévy, l'avocat de François Fillon. "Le parquet national financier s'est auto-saisi sur le fondement d'un délit, le détournement de fonds publics, qui ne peut être reproché à un parlementaire de la République", ajoutait-il, une manière de nourrir la "théorie du complot", selon laquelle le PNF aurait tout fait pour empêcher le candidat de droite de remporter la présidentielle. Trois jours plus tôt, François Fillon lui-même croyait bon d'affirmer que le PNF "n'était sans doute pas compétent pour se saisir de cette affaire".

Caisse noire du Sénat

La Cour de cassation a réduit à néant cette interprétation du droit. Saisis par des sénateurs de droite dans une affaire de caisse noire au Palais du Luxembourg, les juges ont estimé, selon le Canard enchaîné, que le parlementaire était bien "chargé, directement ou indirectement, d'accomplir des actes ayant pour but de satisfaire l'intérêt général". Les sénateurs et députés sont donc bien "chargés d'une mission de service public" et donc susceptibles d'êtres condamnés en justice pour détournement de fonds publics.

Contrairement à ce qu'il pensait, François Fillon n'est donc pas au-dessus de la loi. Pas plus que n'importe quel citoyen français, il n'a le droit de détourner de l'argent public impunément. Ce qui pourrait doublement le contrarier : en plus de l'affaire Penelope, l'ex-parlementaire est cité dans l'affaire de la caisse noire du Sénat. Entre 2004 et 2007, il aurait touché 21.000 euros, en sept chèques.

Réforme des retraites : l’enfumage continue | Contrepoints

Réforme des retraites : l'enfumage continue | Contrepoints

Réforme des retraites : l'enfumage continue

Par Thierry Benne.

Un article de l'Iref-Europe

Après que le Haut-Commissaire à la Réforme des Retraites et le Gouvernement aient fait filtrer des informations laissant craindre que les pensions de réversion puissent être l'une des variables d'ajustement de la prochaine réforme des retraites, la levée de boucliers a été telle que subitement le pouvoir a réalisé qu'il s'était engagé dans une impasse où il n'avait que des coups à prendre. En effet, les tenants de la réversion étaient pleinement dans leur rôle de défense de la veuve et de l'orphelin, lorsqu'ils ont immédiatement objecté haut et fort que :

  • 89% des quelque 4,4 millions de pensions de réversion sont perçues par des veuves et pour plus d'un million d'entre elles (1 079 000 exactement selon les chiffres 2016 de la DREES), ces pensions constituent la seule ressource de leurs bénéficiaires, ce qui ne les empêche d'ailleurs pas toujours de verser du mauvais côté du seuil de pauvreté ;
  • certaines de ces pensions pourvoient également à l'entretien d'orphelins, dont l'assistanat se détourne volontiers, nos priorités sociales privilégiant ouvertement celui qui n'a rien cotisé du tout, par rapport à celui qui a eu un temps assez d'argent pour pouvoir cotiser ;
  • près des deux tiers des bénéficiaires d'une pension de réversion ont plus de 75 ans et près de la moitié ont plus de 80 ans, avec un budget santé qui n'a évidemment rien à voir avec le budget moyen retenu par l'INSEE dans son calcul du coût de la vie ;
  • les pensions de réversion sont actuellement l'arme majeure et aussi le dispositif le plus immédiatement efficace dans le combat pour l'égalité homme/femme, puisqu'elles permettent sans délai de réduire statistiquement de 42 à 24% l'écart résultant entre les rémunérations des hommes et des femmes ;
  • on ne peut s'obstiner à secouer violemment les uns après les autres les piliers d'une vraie politique familiale, sans avoir à déplorer quelques années plus tard les ruptures démographiques qui sanctionnent immanquablement de telles initiatives. Ainsi l'INSEE vient de tirer la sonnette d'alarme sur 2016 en constatant sur la France entière (Mayotte compris) une baisse alarmante des naissances de 4,06 % depuis 2010 (et même bien pire : de 9,3% sur la seule France Métropolitaine de 2010 à 2017 !), résultat imparable de la succession de matraquages en règle faisant de la famille l'une des cibles prioritaires d'un législateur fou qui a perdu tous ses repères.

Si bien que l'opinion et l'opposition se sont à juste titre très largement émues de ces rumeurs insistantes, lesquelles au surplus confortent encore l'image de Président des riches qui commence à coller comme la tunique de Nessus à la personne du chef de l'État. C'est dans ce contexte d'inquiétude et d'urgence pour le pouvoir qu'est intervenu le tweet présidentiel, censé définitivement apaiser tout son monde :

Aucun bénéficiaire actuel ne verra sa pension de réversion diminuer ne serait-ce que d'un centime.

Sauf que, à la lumière d'expériences récentes et cuisantes, le tweet présidentiel pose au moins autant de problèmes qu'il en résout, surtout qu'à peine un jour après, le Secrétaire d'État aux Relations avec le Parlement n'a pas craint d'envisager la baisse de certaines pensions de réversion, tandis que ses collègues du gouvernement annonçaient alternativement tout et son contraire et que, de son côté, le Haut-Commissaire aux retraites n'apaisait pas davantage les inquiétudes.

Pas un centime en moins ?

Rappelez-vous : quand ils protestent contre le défaut de revalorisation annuelle de la prestation, les bénéficiaires de l'APL se voient objecter par le pouvoir qu'ils n'ont pas perdu un seul centime, puisque le montant de l'APL se trouve simplement gelé et non pas réduit. On comprend tout de suite qu'en la matière le pouvoir s'en tient à un nominalisme monétaire de mauvais aloi, alors que le raisonnement économique l'aurait obligé à reconnaître honnêtement une perte de pouvoir d'achat à raison de l'inflation qui redémarre quelque peu (certes 1% en 2017, mais vers 2% pour la tendance 2018).

Donc dans le tweet ci-dessus et au vu d'exemples récents dont les APL ne fournissent qu'une illustration parmi d'autres, rien dans la promesse présidentielle ne garantit formellement le maintien du pouvoir d'achat de pensions de réversion, le plus souvent modestes et à caractère fortement alimentaire, alors justement que la plupart des autres pensions sont déjà depuis plusieurs années iniquement gelées ou rabotées.

Les « bénéficiaires actuels »

Certes, il a été publiquement annoncé comme préambule à la réforme qu'elle ne porterait pas atteinte aux droits des retraités actuels ou aux actifs très proches de la retraite (moins de 5 ans), droits dont la réversion lors du décès du premier conjoint fait précisément partie. Mais les propos des uns et des autres sont suffisamment ambigus et contradictoires pour que le peuple des retraités, désemparé, ne sache plus à quel saint se vouer.

Or la promesse présidentielle se limite aux seuls bénéficiaires actuels, ce qui laisse entendre a contrario que la réforme à venir ne s'interdirait pas de remettre en cause les futures pensions de réversion provenant de liquidations de pensions directes déjà intervenues et résultant d'engagements et de lois qui, moyennant inévitablement une réduction affichée ou implicite de la pension principale, garantissent le versement d'une pension de réversion en faveur du conjoint lors du prédécès du titulaire de la pension directe.

Notamment, dans certains cas, le retraité a eu à choisir lors de la liquidation de sa pension entre un montant majoré sans option de réversion et un montant minoré en cochant une option de réversion en faveur du conjoint. Mais même quand ce choix n'a pas été proposé, du fait que la répartition permet d'assimiler les retraites à une enveloppe plafonnée, les sommes consacrées aux pensions directes pâtissent inévitablement dans la redistribution globale de la concurrence des pensions de réversion. Donc nombre de retraités encore vivants se trouvent financer depuis de longues années et en faveur de leurs conjoints une option de reversion qu'ils ont d'ores et déjà partiellement acquittée (à leur gré ou à leur insu) en acceptant ou en étant contraints de toucher de leur vivant une pension directe minorée.

On ne voit vraiment pas pourquoi d'un coup ces équilibres actuariels tout à fait licites et honorables se trouveraient rétroactivement remis en cause, sans compensation aucune. Pourtant devant la cacophonie ambiante et faute d'assurance contraire, les retraités légitimement inquiets pour l'avenir de leurs conjoints sont légitimement amenés à se demander si la promesse initiale de non-rétroactivité de la réforme couvre bien également et toujours les droits à reversion attachés aux pensions directes actuellement versées, mais non encore mobilisés du fait même de la survie actuelle du conjoint. Et la grogne qui monte de toutes parts commence à faire sérieusement désordre dans la mécanique si minutieuse et si bien huilée de la communication présidentielle.

Conclusion : un peu plus de clarté ne messiérait pas

En réalité, ce qu'on aurait attendu d'un Chef de l'État parlant clair, c'est l'engagement solennel et expresse que toutes les réversions actuellement liquidées, ou celles à provenir de pensions principales actuellement en cours de payement, soient intégralement préservées.

Engagement sans doute infiniment trop précis, pour quelqu'un qui montre tous les jours qu'il a fait sien et presque de manière maladive le vieil adage du Cardinal de Retz, antienne de toutes les bonnes écoles de sciences politiques et selon laquelle « on ne sort jamais de l'ambiguïté qu'à ses dépens ».

Le problème, c'est que quand on revendique l'indispensable confiance des Français au seuil d'une réforme qu'on présente comme systémique et capitale, on ne peut constamment naviguer tous feux éteints en leur cachant une partie importante de la vérité, en soufflant successivement le chaud et le froid et en privilégiant un discours dont chaque mot apporte pratiquement autant, sinon plus, de trouble que d'apaisement.


Suppression de la taxe d’habitation : l’exécutif veut le transfert du foncier bâti au bloc communal

Suppression de la taxe d'habitation : l'exécutif veut le transfert du foncier bâti au bloc communal

Suppression de la taxe d'habitation : l'exécutif veut le transfert du foncier bâti au bloc communal

Conférence nationale des territoires 04/07/2018 par Aurélien Hélias Instance de dialogue de la Conférence nationale des territoires le 4 juillet à Matignon © @France_urbaine

L'instance de dialogue de la Conférence nationale des territoires qui s'est tenue le 4 juillet à Matignon a permis de lever le voile sur une partie des projets gouvernementaux en matière de réforme de la fiscalité locale. Autres dossiers abordés : la contractualisation financière à affiner, le projet de loi mobilités et l'avenir de la fonction publique territoriale.

« Des débats constructifs », « un Gouvernement qui peut se targuer d'une présence importante de l'Assemblée nationale, du Sénat et des associations d'élus », des échanges « facilités par la présence de moins de monde autour de la table »… les réactions des participants au sortir de l'instance de dialogue de la Conférence nationale des territoires le 4 juillet à Matignon étaient globalement positives. Des appréciations somme toute logiques puisqu'elles émanent de ceux n'ayant pas décidé de suivre les trois principales associations d'élus, AMF, ADF et Régions de France, dans le boycott de cette réunion de travail Etat-collectivités. De quoi aborder de nombreux dossiers lors de cette réunion de plus de trois heures, dont le format restait tout de fois un brin formel, « fait de communications de ministres, du Premier ministre, puis de réactions et demandes d'associations d'élus », rapporte un participant. Sans que le Gouvernement n'apporte toutes les réponses… 

Le foncier bâti départemental pour financer la suppression de la TH

Évoquée la veille par des fuites dans la presse, le projet du Gouvernement de transférer le produit de la part départementale de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) au bloc communal pour financer une partie de la perte de la taxe d'habitation a été confirmé par Edouard Philippe et Olivier Dussopt. Mardi, plusieurs semaines après avoir finalement évacué cette hypothèse qui hérissait les départements, le Comité des finances locales s'était prononcé pour un dégrèvement à 100 % de la taxe d'habitation, « la seule solution qui permette de respecter la totalité des engagements du président de la République » selon le patron du CFL, André Laignel. A savoir « garantir une compensation intégrale des ressources supprimées ; préserver la dynamique des bases ; garder le pouvoir de taux des communes, des intercommunalités et des départements ; respecter intégralement leur autonomie financière et fiscale et maintenir le lien fiscal entre les collectivités territoriales et les citoyens », listait-il.

Sous la demande de l'AdCF, la délibération avait tout de même évolué : « d'une délibération demandant un dégrèvement définitif, on est passé à un dégrèvement d'ici à ce qu'on change l'organisation de la fiscalité locale », selon le représentant de l'association des élus intercommunaux à l'AdCF, Loïc Cauret. « Nous n'étions pas très enthousiastes sur le dégrèvement. Nous avons demandé comme préalable une refonte de la fiscalité locale, avec l'impérieuse nécessité de réviser les valeurs locatives », ajoutait Sébastien Miossec, président de Quimperlé communauté. Car ces bases servent pour bien d'autres bases que celles de la TH ! » Le Gouvernement, par la voix d'Olivier Dussopt, se serait engagé lors de l'instance de dialogue à Matignon, à réformer les bases à l'occasion d'une loi de finances rectificatives en 2019 qui en fixerait la méthode. C'est « la mère des réformes pour organiser une fiscalité équitable pour les contribuables et dynamique pour les collectivités », ont renchéri de concert France urbaine, Villes de France, les petites villes et l'AdCF dans un communiqué commun diffusé l'après-midi de la réunion avec le Gouvernement.

Au final, la piste privilégiée par l'exécutif est une douche froide pour les départements, qui voient dans le transfert du produit du foncier bâti vers le bloc local une perte de leur pouvoir de taux. S'y ajouterait enfin une complexité également redoutée par le CFL : la nécessaire mise en place la mise en place « d'un fonds national de garantie, dans le droit fil de celui qui fut instauré lors de la suppression de la Taxe professionnelle. « Tout le monde est mécontent du FNGIR, parce qu'il est bloqué à la date de sa mise en œuvre. S'il y avait un nouveau, il subirait le même sort, et l'engagement de l'Etat de rembourser à l'euro près ne serait pas respecté », prévient ainsi André Laignel face à ce «système de spoliation ».

Le scénario redouté par les intercos écarté

Quant aux intercommunalités, c'est en revanche le soulagement : si elles craignaient le scénario d'un transfert de la totalité de la TFPB aux seules communes, aussi bien la part départementale qu'intercommunale, il n'en serait pas question pour l'exécutif. Seule la part départementale serait fléchée vers les communes pour compenser une partie de la perte du produit de TH, les EPCI conservant leur « part » actuelle. Seule incertitude : la part départementale pourrait ne bénéficier demain qu'aux seules communes, sans que les intercos ne perçoivent un surplus de TFPB au prorata de leurs anciennes recettes de TH.

reste que petites et moyennes villes, métropoles et intercos souscrivent communément « à la décision du gouvernement d'affecter l'ensemble de la taxe foncière sur les propriétés bâties au bloc communal tout en poursuivant la réflexion sur la ressource fiscale complémentaire qu'il faudra identifier ». Pour l'AdCF, c'est sur une part complémentaire de CVAE qu'il faudrait se pencher. 

Contractualisation financière : des ajustements possibles

Alors que le ministère de l'Intérieur n'a pas manqué de communiquer la veille sur les 71 % de collectivités, soit 229 sur 322 visées, ayant signé leur pacte financier avec l'Etat, Edouard Philippe se serait montré ouvert aux requêtes d'ajustement faites par l'ADCF et France urbaine. « C'est le Comité de suivi qui fera la synthèse des demandes. Le Premier ministre dit vouloir garder une certaine souplesse et nous a indiqué que la loi de finances pourrait amender les contrats afin que certaines subventions de fonctionnement servant à financer l'investissement ne soient plus considérés comme des dépenses de fonctionnement », rapporte le patron de l'AdCF, Jean-Luc Rigaut. Une manière pour l'exécutif de prendre en compte un message envoyé par plusieurs associations d'élus – « participation n'est pas approbation » -, le président de la délégation sénatoriale aux collectivités, Jean-Marie Bockel, relevant les « diverses critiques des associations d'élus présentes sur les contrats malgré les signatures ». 

Mobilités : trouver des voies de financement

C'est l'un des dossiers les moins polémiques évoqués : les mobilités. Le président de la délégation sénatoriale aux collectivités du Sénat, qui avait acté sa présence en accord avec le président du sénat Gérard Larcher, relève ainsi « un consensus sur la méthode », alors que le projet de loi d'orientation des mobilités (Lome) est encours d'arbitrage. « Le Premier ministre s'est montré ouvert à l'évocation d'une contribution écologique, d'une taxe » pour financer les futurs contrats opérationnels de mobilité, se félicite-t-on à l'AdCF. L'association milite communément avec Villes de France, Franc urbaine et les petites villes « pour l'affectation d'une part de la contribution énergie climat aux projets de transition énergétique et de mobilité durable dans les territoires ».

Pour les Petites villes, Christophe Bouillon a appuyé la volonté du gouvernement d'en finir avec les zones blanches en matière de présence d'autorités organisatrices de la mobilité, mais plaidé pour que « la compétence soit sécable », selon « un principe de subsidiarité ». Un point sur lequel « l'écoute de la ministre » Elisabeth Borne est saluée par le patron de l'APVF. 

Fonction publique territoriale : en attendant Action publique 2022…

Président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, Philippe Laurent a prononcé « une communication très fournie », selon un participant à la réunion, sur la concertation en cours entre le gouvernement et les employeurs territoriaux. Et le maire de Sceaux de répéter l'hostilité des employeurs territoriaux à l'idée gouvernementale de permettre aux contractuels l'accès à tous les postes fonctionnels. Au nom des petites villes, Christophe Bouillon a pour sa part réclamé un minimum de « garde-fous sérieux : nous demandons un plafonnement des rémunérations pour ces contractuels ayant accès à des postes de direction et un plafonnement de la proportion de ces postes ouverts ». Réponse sibylline du gouvernement se contentant de souligner que le dispositif ne pourrait concerner « que 6 000 postes au plus »…

Plus globalement, il faudra attendre la diffusion concomitante du rapport Action publique 2022 et les propositions qu'en retiendra l'exécutif pour obtenir des réponses du Gouvernement sur le dossier. Levée de rideau lors de la CNT proprement dite du 12 juillet ? Rien n'est moins sûr, étant donné l'ordre du jour officiel prévu par le Gouvernement…

Quid de l'ordre du jour du 12 juillet ?

Car, censée être une réunion préparatoire, l'instance du dialogue du 4 juillet pourrait avoir abordé des sujets majeurs qui seront ignorés de la séance plénière huit jours plus tard. L'exécutif a en effet décidé de placer la CNT proprement dite du 12 juillet sous le signe de l'Europe, de la cohésion des territoires et des fonds de cohésion. Leur devenir inquiète certes plus d'un territoire, mais plusieurs associations d'élus craignent que le gouvernement ne fasse l'impasse sur les dossiers majeurs des réformes de la fiscalité locale et de la fonction publique territoriale. Or la réunion du 4 a eu les avantages et les inconvénients d'une « simple instance de consultation : utile pour faire circuler les informations, mais peu productive pour annoncer les décisions… », souligne Christophe Bouillon. Les questions des élus ne devraient donc pas se circonscrire aux fonds européens dans une semaine.

Quant à la probable absence renouvelée des trois grandes associations d'élus dans huit jours, « elle ne serait pas un drame pour cette journée consacrée aux fonds structurels européens, juge Jean-Marie Bockel. En revanche, si cette absence se poursuit en septembre, cela posera problème… »


mercredi 4 juillet 2018

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Nantes, quartier du Breil: un jeune homme tué par la police lors d'un contrôle, entraînant des violences urbaines

Nantes, quartier du Breil: un jeune homme tué par la police lors d'un contrôle, entraînant des violences urbaines

Nantes, quartier du Breil: un jeune homme tué par la police lors d'un contrôle, entraînant des violences urbaines

Le conducteur avait refusé d'obtempérer lors d'un contrôle policier.

FAITS DIVERS - Un jeune homme de 22 ans est mort ce mardi 3 juillet dans la soirée à Nantes après avoir été touché par balle par un policier lors d'un contrôle, un décès provoquant des violences urbaines dans des quartiers sensibles de la ville.

Les faits se sont déroulés vers 20h30 lors d'un "contrôle diligenté par un équipage de CRS suite à des infractions commises par un véhicule", a déclaré sur place à la presse Jean-Christophe Bertrand, directeur départemental de la Sécurité publique (DDSP).

L'identité de l'automobiliste n'étant "pas claire, les CRS ont reçu pour ordre de ramener le conducteur" au commissariat. "Le conducteur, faisant mine de sortir de son véhicule, a percuté un fonctionnaire de police" qui a été légèrement blessé aux genoux, a indiqué le DDSP.

"Un de ses collègues a fait feu et a touché le jeune homme qui est malheureusement décédé", a-t-il déclaré.

Selon des sources policières, le jeune aurait été touché à la carotide et serait décédé à son arrivée à l'hôpital.

Le DDSP de confirme le décès d'un jeune conducteur de 22 ans après le refus d'un contrôle de police et les scènes d'émeutes depuis dans le quartier du Breil @TF1LeJT @LCI

— Laurent Giraudineau (@Girogirau)

Le mur qu'a percuté le jeune de 20 ans au . Les habitants et journalistes présents s'étonnent que l'IGPN ne soit pas sur les lieux. A 1h18, une trentaine d'habitants sont sur les lieux du drame. Aucune trace d'enquête.

— Marion Lopez (@MarionLpz)

Coup de feu dans le quartier du : un jeune est décédé après un contrôle de qui aurait mal tourné https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/nantes-44000/nantes-coup-de-feu-au-breil-un-jeune-entre-la-vie-et-la-mort-5861329 

— Ouest-France (@OuestFrance)

Cocktails Molotov

"Le SRPJ de Nantes et l'Inspection générale de la police nationale sont saisies de l'enquête afin de préciser la commission des faits et déterminer dans quelles circonstances le policier a été amené à faire usage de son arme", a précisé à l'AFP le procureur de la République de Nantes, Pierre Sennès.

Le décès a aussitôt déclenché des violences urbaines dans le quartier du Breil où des jeunes étaient armés de cocktails Molotov, selon une source policière. Des voitures ont été incendiées, ainsi qu'un centre paramédical situé dans un centre commercial, a constaté l'AFP.

Situation très tendue dans le quartier de Breil à Nantes (et au-delà). Des révoltes urbaines ont éclaté après la mort d'un jeune homme touché par un tir policier. Il était en voiture, aurait fait marche arrière pr échapper à une interpellation & a reçu une balle "sans sommation".

— Sihame Assbague (@s_assbague)

L'info du décès du jeune conducteur du vient de tomber. L'ambiance se tend sensiblement, les insultes fusent à destination des policiers.

— Marion Lopez (@MarionLpz)

Les forces de l'ordre progressent dans le quartier du . Des tirs de grenades lacrymogènes arrivent entre les immeubles. La tension est au maximum. Les jeunes s'organisent. « Ils vont nous cramer le quartier », dit une dame.

— Marion Lopez (@MarionLpz)

un local commercial et plusieurs véhicules incendiés dans la soirée

— Laurent Giraudineau (@Girogirau)

Les pompiers ont maîtrisé l'incendie du local associatif et centre médical

— JFMartin (@JFrancoisMartin)

Dispositif de sécurité renforcé

"Dès le démarrage de l'intervention, des violences urbaines ont éclaté. On continue de sécuriser l'intervention des pompiers", devant le centre para-médical incendié, situé dans un centre commercial du quartier, a précisé Jean-Christophe Bertrand.

Un habitant du quartier, Steven, 24 ans, a déclaré à une journaliste de l'AFP avoir "entendu des détonations". "J'ai mis une demi-heure à descendre. Je voyais que ça brûlait de partout, ça courrait de partout. Il y avait le feu à des poubelles, à des voitures. Ils étaient en train de tout casser. Ça a duré super longtemps". Selon le jeune homme, le calme est revenu peu après minuit.

La situation semblait apaisée peu avant 1h dans le quartier du Breil, mais d'autres violences ont aussi éclaté dans deux autres zones sensibles de Nantes, aux Dervallières et à Malakoff, quartier où des véhicules ont été incendiés, a constaté une journaliste de l'AFP.

@france 3 pays-de-la-loire les violences urbaines s'étendent à d'autres quartiers de . Les voitures brûlent dans la cité des Dervallières

— France 3 Pays de la Loire (@F3PaysdelaLoire)

du Breil toujours sous surveillance après la mort d'un jeune. Les forces de police et les pompiers s'apprêtent à intervenir à Malakoff où les violences urbaines se sont déplacées

— France 3 Pays de la Loire (@F3PaysdelaLoire)

2h23. Au moins trois bâtiments sont en flammes aux . Et des feux sont aussi évoqués dans le quartier de à .

— Marion Lopez (@MarionLpz)

Johanna Rolland, maire PS de Nantes, est arrivée peu avant 2h30 aux Dervallières. "Mes premières pensées vont à ce jeune homme mort, à sa famille, à tous les habitants de ce quartier, de nos quartiers", a-t-elle déclaré. "La police et la justice dans son indépendance devront faire la clarté et la plus totale des transparences sur ce qui s'est passé ce soir", "mais l'urgence ce soir, c'est l'appel au calme dans nos quartiers", a-t-elle martelé

La situation semblait apaisée peu avant 3h dans les trois quartiers touchés par les violences. Il n'y a pas eu d'interpellation, selon une source policière.

Près de 200 policiers sont mobilisés, indique la DDSP. Le quartier du Breil était placé en dispositif de sécurité renforcé après la découverte d'un blessé par balle la semaine dernière avec suspicion de l'usage d'une arme de guerre, selon une source proche du dossier.

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Les cryptomonnaies vues par les politiciens | Contrepoints

Les cryptomonnaies vues par les politiciens | Contrepoints

Les cryptomonnaies vues par les politiciens

Les financiers pourfendeurs des cryptomonnaies ne sont pas avares de sophismes, mais nos dirigeants exposent leurs lacunes pour nous parler de cette nouvelle classe d'actifs.

Par Nicolas Perrin.

Nos politiciens ont commencé à se pencher sur les cryptomonnaies en début d'année. Vu la méconnaissance totale du sujet dont a fait preuve la grande majorité d'entre eux, on se dit qu'ils y sont vraiment allés sans munitions.

Le 7 février se tenait au Sénat une table ronde sur le bitcoin. Cela a été l'occasion pour Éric Bocquet, sénateur communiste du Nord et vice-président de la Commission des finances (oui, en France, en 2018, c'est bien un communiste qui siège à ce poste), de s'illustrer.

Au nombre des professionnels du secteur qui ont dû se retenir de rire dès que le sénateur ouvrait la bouche pour leur poser une question, on comptait, rapporte Capital : « Gilles Fedak, cofondateur de l'entreprise iExec, Sandrine Lebeau, responsable de la conformité et du contrôle interne pour le courtier La Maison du Bitcoin et Simon Polrot, fondateur du site Ethereum France »

Parmi les perles que l'on doit à cet ancien prof d'Anglais, on trouve :

  • « C'est une technologie cryptographique qui garantit l'anonymat »
  • « Où la plateforme de gestion du bitcoin est-elle localisée ? » Autant dire qu'Éric Boquet n'a jamais dû entendre parler de décentralisation…
  • « Qui sont les actionnaires de Bitcoin ? » Hum… quand on confond une entreprise et un cryptoactif doublé d'un système de paiement mondial, a-t-on plutôt sa place au Sénat, à la mairie de Marquillies, dans une salle de cours d'anglais… ou plutôt au piquet ?

Lorsque j'étais écolier, et qu'un élève n'avait pas appris sa leçon, l'instituteur l'envoyait au coin. Je trouve bien dommage que cette pratique n'ait pas cours au Sénat.

Quand le responsable d'une mission sur les cryptomonnaies exhibe ses lacunes sur le sujet

Vous savez sans doute qu'en janvier, Bruno Le Maire a chargé le haut fonctionnaire Jean-Pierre Landau d'une mission sur les cryptomonnaies.

Ce diplômé d'HEC, de Sciences Po et de l'ENA a-t-il relevé la barre ? Sans aucun doute, mais il peut encore mieux faire.

Le 14 mai, lors de son audition par la « Mission d'information sur les monnaies virtuelles » (comme vous pouvez le constater ci-dessous, ce n'est pas moi qui les appelle comme ça !) présidée par Éric Woerth, il a tenu plusieurs propos erronés.

« Un actif financier c'est quelque chose qui a une valeur intrinsèque (même si elle est parfois difficile à reconstituer) qui est soit une valeur d'usage, soit une perspective de revenus futurs, certains ou aléatoires […]. Les cryptomonnaies n'ont aucune valeur d'usage aujourd'hui – peut-être en auront-elles à l'avenir – et elles n'ont aucune perspective de revenus ni certains ni aléatoires. Donc elles ne méritent pas conceptuellement la classification d'actifs financiers[…].

Les cryptomonnaies qui existent aujourd'hui sont à l'évidence extrêmement imparfaites : elles sont très peu acceptées comme moyen de paiement, elles sont lentes, elles sont grandes consommatrices de ressources, elles sont affectées d'une grande volatilité et sont devenues pour certaines d'entre elles des objets évidents de pure spéculation. […]

Il y a des projets pour remédier à ces efficiences. À ce stade je suis personnellement un tout petit peu sceptique sur la possibilité pour ces innovations de se développer et d'arriver à des processus qui soient à la fois décentralisés, efficaces et rapides et totalement sûr… »

On reconnaitra volontiers que Jean-Pierre Landau s'est penché sur la question au point de s'intéresser aux chantiers en cours au sein de l'écosystème des cryptos, et qu'il nous a épargné les poncifs habituels.

Le niveau est donc plus relevé qu'au Sénat et qu'à la Banque de France (comme nous le verrons prochainement), dont il a d'ailleurs été second sous-gouverneur de 2006 à 2011.

Éric Woerth n'étant de son propre aveu pas (encore) un expert en matière de cryptos, il n'a pas été en mesure de nuancer certaines des assertions de Jean-Pierre Landau. Je vais donc m'y coller.

Pour ce qui est de la valeur d'usage du bitcoin, les choses avancent certes lentement, mais elles avancent, en particulier dans la sphère privée. Même dans la sphère publique, certains États ou collectivités territoriales ont déjà permis ou pourraient bientôt permettre le règlement des impôts en cryptos.

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Pour ce qui est de la production de revenus par les cryptos, il est faux d'avancer que « les cryptomonnaies […] n'ont aucune perspective de revenus ni certains ni aléatoires ».

En effet, les monnaies qui se minent par preuve d'enjeu (proof of stake POS) – par opposition à preuve de travail (proof of work POW), comme c'est le cas de Bitcoin – peuvent être stakées/stockées. En les conservant dans un wallet dédié, vous aurez ponctuellement droit à la perception d'un revenu fixe en fonction des règles édictées par les développeurs de la crypto en question, sous la forme d'unités supplémentaires du même token (jeton) ou, plus rarement, d'un autre token, lui-même coté et négociable sur certaines plateformes. Ce principe peut être comparé à celui des intérêts que vous percevez par exemple sur votre Livret A ou sur le fonds euros de votre contrat d'assurance-vie.

Comme l'explique bitcoin.fr, « la preuve d'enjeu demande à l'utilisateur de prouver la possession d'une certaine quantité de cybermonnaie (leur 'participation') pour prétendre valider des blocs supplémentaires dans la chaîne de bloc et de toucher la récompense ».

Cette forme de minage est beaucoup moins gourmande en ressources que ne l'est la POW et peut être réalisée à partir de n'importe quel ordinateur récent, sans investir dans du matériel de minage.

Parmi les cryptos les plus connues qui peuvent être stakées, on trouve NEO qui permet de miner du GAS, un token qui permet de payer les frais dans les transactions réglées en NEO, et qui est par exemple négociable sur Binance, Poloniex ou encore KuCoin.

Certains sites répertorient ces cryptomonnaies bien particulières ainsi que le taux de rémunération dont elles font l'objet.

Ce n'est pas le seul moyen d'obtenir un revenu fixe à partir de vos cryptomonnaies. Une autre solution consiste en effet à les conserver sur une plateforme d'échange pour les prêter contre intérêt (à un taux que vous fixez librement) à d'autres investisseurs qui vont les trader « sur marge ».

Cela n'est cependant possible que sur les cryptos majeures et sur certaines plateformes. Je ne développe pas, car il ne s'agit pas d'un mécanisme spécifique aux cryptomonnaies.

Mais contrairement à ce qu'avance Jean-Pierre Landau, certaines cryptos se distinguent des devises étatiques à cours légal en cela que ce sont plutôt ces dernières qui ne produisent aucun revenu.

Notre ministre de l'Économie et des Finances est-il plus calé sur ce sujet ? C'est ce que nous verrons la semaine prochaine.

Pour plus d'informations, c'est ici