dimanche 5 octobre 2014

ALIEN ÉOLIENNE


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Les éoliennes tueuses de chauves-souris
Certaines espèces les confondent avec des arbres.
Les chauves-souris sont confrontées à un prédateur qui les décime par dizaines de milliers, voire par centaines de milliers chaque année, selon les pays. Ces mammifères volants se tuent lors de collisions avec des éoliennes et leurs pales. Mais pourquoi plusieurs espèces sont-elles atteintes en grand nombre? Pendant leur migration, entre la fin de l'été et le début de l'automne, certaines semblent confondre les turbines géantes avec de grands arbres, où elles peuvent se nourrir d'insectes, prendre du repos et s'arrêter pour se reproduire. Le comportement de ces animaux, en particulier de 3 des 45 espèces qui sont les plus grandes victimes aux États-Unis, a été décrit dans les Comptes rendus de l'académie américaine des sciences (Pnas), le 29 septembre. Au moyen de trois éoliennes dans l'Indiana, à la fin de l'été 2012, des liens ont été établis entre la force du vent, la vitesse de rotation des pales et le taux de mortalité des chauves-souris. Près de 1000 vols d'animaux ont été documentés au moyen de caméras thermiques et d'enregistreurs d'ultrasons. Pendant la durée de l'étude 12 cadavres ont été retrouvés au pied des éoliennes.
Pour Jean-François Julien, chiroptérologue, chercheur CNRS au Muséum national d'histoire naturelle, «c'est la première fois que nous avons des données aussi précises sur l'attrait des éoliennes sur certaines espèces de chauves-souris. Nous mettons en place un projet de recherche comparable en France avec l'Ademe».
Les chauves-souris se trompent car elles «sentent» les flux d'air produits par la rotation des pales. «Une recherche récente nous a inspirés. Celle qui montre que lorsque vous enlevez de minuscules poils (avec une crème à épiler, NDLR) sur les ailes de chauve-souris, elles perdent leur capacité à bien voler et à franchir des obstacles », confie Paul Cryan, biologiste au Fort Collins Science Center, et premier auteur de la publication dans Pnas.
«Pour s'orienter, les chauves-souris utilisent l'écho-localisation, une sorte de sonar à ultrasons. Mais la portée est relativement faible et cette méthode leur coûte beaucoup d'énergie. Lors des migrations, elles se serviraient donc plutôt de leur vision et de leur sens magnétique. Car, les chauves-souris ne sont pas aveugles! De plus, elles ont sur les ailes des milliers de microscopiques poils, comme des sondes Pitot, qui les aident à apprécier les flux d'air», ajoute le chercheur français. Celles qui se font prendre au piège des éoliennes sont, en particulier, les espèces qui gîtent dans les arbres.
Un moyen de réduire le taux de mortalité est de débrayer les pales des éoliennes quand le vent est inférieur à 6 m/s (environ 20 km/heure). C'est effectué à titre expérimental aux États-Unis, au Canada et en Europe. Cela coûterait moins de 1 % de la production d'électricité annuelle par éolienne, estiment des chercheurs. Les taux de mortalité diminuent alors d'au moins 50 % et peuvent même atteindre 90 %.
Sauver les chauves-souris, même si leur nombre en France est estimé entre 10 et 20 millions d'individus, est une question vitale. «Leurs populations ne s'adaptent pas vite à de grandes pertes. Or elles jouent un rôle clé dans de nombreux écosystèmes », ajoute Paul Cryan. Ce sont les premiers prédateurs, dans la chaîne alimentaire, des insectes nocturnes. «Dans les régions tempérées, la baisse du nombre de chauves-souris a un impact sur le rendement de certaines cultures, détaille Jean-François Julien. Car elles ont un rôle d'insecticide naturel.» Aux États-Unis, l'impact de leur disparition est estimé entre 7 et 50 milliards de dollars uniquement sur les récoltes. Dans les régions tropicales, elles ont un rôle majeur pour la pollinisation, notamment de 100 % pour celle du durian, un gros fruit vert doté de piquants, en Asie. Les espèces qui mangent des fruits contribuent aussi à la dispersion des graines et donc à la régénération des forêts.

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