REPORTAGE Avec 4 300 manifestants pour 13 700 habitants le 31 janvier, la préfecture de la Creuse incarne, avec d’autres villes petites et moyennes, l’opposition de la France rurale à la réforme des retraites.
"Voilà longtemps que Guéret, petite préfecture de la Creuse (13 700 habitants pour l’agglomération), n’avait pas été citée dans les médias nationaux, aux côtés de Mende, Vierzon, Périgueux, Alès, entre autres villes moyennes de cette France que d’aucuns disent « périphérique » sur le pied de guerre pour dire non au report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans. Ils étaient 4 300 à noircir la place Bonnyaud, le 31 janvier (plus de 5 000, selon les syndicats), plus que le 19 janvier, et peut-être moins que les 7 et 11 février – malgré les congés d’hiver. Du jamais-vu depuis 1995 et les grèves massives contre le « plan Juppé » sur les retraites. Même lors des victoires françaises aux Coupes du monde." (…)
"Les transports sont particulièrement impactés par le mouvement, en particulier le rail. Le syndicat SUD-Rail annonce 35% de grévistes à la SNCF ce mardi dont 50% chez les conducteurs.
Plus d'un salarié sur deux (56%) est en grève selon la direction de TotalEnergies alors que la CGT estime entre 75 et 100% de grévistes selon les sites.
Chez EDF, les grévistes ont procédé à des baisses de production d'électricité de près de 4 500 MW, l'équivalent de plus de quatre réacteurs nucléaires. Sans que cela ne provoque de coupures, selon la CGT." (...)
"Interviewé mercredi matin sur BFMTV, le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, a dit espérer samedi une "très forte mobilisation" et appelé chacun à "aller manifester massivement avec toute la famille". "Si le gouvernement persiste dans la voie qui est la sienne aujourd'hui, il fait une faute démocratique qu'il paiera très cher. 'Qu'il paiera très cher', ça s'appelle pas une menace, ça s'appelle un avertissement collectif que je pose (...) Bien sûr qu'il y a un risque que ça dégénère", a-t-il ajouté.
Son homologue de la CGT, Philippe Martinez, a de son côté estimé sur LCI qu'il fallait "hausser le ton" face à l'exécutif et qu'il y avait "besoin de décider de grèves, c'est ce que font les raffineurs, c'est ce que font les cheminots, d'autres y réfléchissent aussi". "Parce qu'on n'a pas le choix. Face à un gouvernement qui n'écoute rien, un président de la République qui est convaincu qu'il a raison tout seul, il faut montrer plus de détermination", a-t-il dit."
"En tout cas, le discours de Laurent Berger a changé. Avant le 31 janvier, il tenait ce discours : "Le durcissement à tout crin, c'est perdre une partie de l'opinion. La CFDT, elle n'est pas pour appeler à la grève reconductible". Mardi, en tête de cortège, le leader de la CFDT était beaucoup moins catégorique : "Rien n'est exclu, sauf ce qui atteindrait les gens ou les biens. Nous, on restera dans la légalité, toujours. Il faut qu'on fasse une grosse mobilisation samedi, après on verra ce qu'il convient de faire".
"Revirement culturel"
"Si le gouvernement ne renonce pas, Laurent Berger pourrait donc appeler à des grèves reconductibles dans les transports ou l'énergie, par exemple, quitte à pénaliser les Français, ce à quoi il se refusait catégoriquement jusqu'ici. Selon le politologue Dominique Andolfatto, c'est un virage majeur pour le patron du syndicat réformiste". "Là, c'est comme un revirement culturel qui pourrait se dessiner, alors que la CFDT a patiemment sculpté son ADN réformiste depuis une trentaine d'années. C'est un crève coeur pour le gouvernement : non seulement il n'a pas retourné la CFDT qui n'a pas soutenu sa réforme, mais en plus elle pourrait évoluer vers un mouvement plus dur", souligne t-il.
Reste à savoir quand ce virage pourrait s'opérer, avec le début de potentielles grèves reconductibles à l'appel des syndicats. Peut-être dès le 8 mars, le premier mercredi après la fin des vacances scolaires comme le propose le syndicat Solidaires. D'ici là, l'intersyndicale appelle à manifester samedi et jeudi prochains. Et pour rappel, la durée d'examen du texte par le parlement est limitée à 50 jours, du fait de l'utilisation de l'article 47.1 de la Constitution par le gouvernement. Après, l'Assemblée, ce sera au Sénat d'examiner le texte jusqu'au dimanche 12 mars. Le parlement a jusqu'au 26 mars, au plus tard, pour se prononcer sur la réforme des retraites."
"Laurent Berger et Philippe Martinez rient. Epaule contre épaule, ce 7 février à Paris, pour la troisième journée nationale de mobilisation contre le projet de réforme des retraites, ils tiennent la banderole blanche sur laquelle s’étale en lettres rouges ce mot d’ordre : «Travailler plus longtemps, c’est non !» Si les secrétaires généraux de la CFDT et la CGT badinent devant les objectifs, c’est parce qu’ils viennent de recevoir chacun un SMS d’un journaliste qui leur demande de se recoiffer pour la photo. Cette dernière est symbolique. Depuis treize ans, on n’avait pas vu les représentants des deux syndicats les plus puissants de France unis dans la rue contre un projet gouvernemental." (…)
6 commentaires:
REPORTAGE Avec 4 300 manifestants pour 13 700 habitants le 31 janvier, la préfecture de la Creuse incarne, avec d’autres villes petites et moyennes, l’opposition de la France rurale à la réforme des retraites.
"Voilà longtemps que Guéret, petite préfecture de la Creuse (13 700 habitants pour l’agglomération), n’avait pas été citée dans les médias nationaux, aux côtés de Mende, Vierzon, Périgueux, Alès, entre autres villes moyennes de cette France que d’aucuns disent « périphérique » sur le pied de guerre pour dire non au report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans. Ils étaient 4 300 à noircir la place Bonnyaud, le 31 janvier (plus de 5 000, selon les syndicats), plus que le 19 janvier, et peut-être moins que les 7 et 11 février – malgré les congés d’hiver. Du jamais-vu depuis 1995 et les grèves massives contre le « plan Juppé » sur les retraites. Même lors des victoires françaises aux Coupes du monde."
(…)
https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/02/07/retraites-a-gueret-la-france-rurale-vent-debout-contre-la-reforme-si-meme-ca-on-nous-l-enleve-a-quoi-bon-continuer-de-se-lever_6160812_3224.html
Transports, EDF, raffinerie...
"Les transports sont particulièrement impactés par le mouvement, en particulier le rail. Le syndicat SUD-Rail annonce 35% de grévistes à la SNCF ce mardi dont 50% chez les conducteurs.
Plus d'un salarié sur deux (56%) est en grève selon la direction de TotalEnergies alors que la CGT estime entre 75 et 100% de grévistes selon les sites.
Chez EDF, les grévistes ont procédé à des baisses de production d'électricité de près de 4 500 MW, l'équivalent de plus de quatre réacteurs nucléaires. Sans que cela ne provoque de coupures, selon la CGT."
(...)
https://www.midilibre.fr/2023/02/07/greve-du-7-fevrier-en-france-et-en-occitanie-un-troisieme-round-social-un-peu-moins-suivi-le-point-a-la-mi-journee-10981275.php
"Hausser le ton"
"Interviewé mercredi matin sur BFMTV, le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, a dit espérer samedi une "très forte mobilisation" et appelé chacun à "aller manifester massivement avec toute la famille". "Si le gouvernement persiste dans la voie qui est la sienne aujourd'hui, il fait une faute démocratique qu'il paiera très cher. 'Qu'il paiera très cher', ça s'appelle pas une menace, ça s'appelle un avertissement collectif que je pose (...) Bien sûr qu'il y a un risque que ça dégénère", a-t-il ajouté.
Son homologue de la CGT, Philippe Martinez, a de son côté estimé sur LCI qu'il fallait "hausser le ton" face à l'exécutif et qu'il y avait "besoin de décider de grèves, c'est ce que font les raffineurs, c'est ce que font les cheminots, d'autres y réfléchissent aussi". "Parce qu'on n'a pas le choix. Face à un gouvernement qui n'écoute rien, un président de la République qui est convaincu qu'il a raison tout seul, il faut montrer plus de détermination", a-t-il dit."
https://www.francebleu.fr/infos/economie-social/reforme-des-retraites-la-cinquieme-journee-de-mobilisation-aura-lieu-le-jeudi-16-fevrier-3238318
https://www.nouvelobs.com/social/20230208.OBS69333/laurent-berger-l-homme-cle-de-la-mobilisation.html
"En tout cas, le discours de Laurent Berger a changé. Avant le 31 janvier, il tenait ce discours : "Le durcissement à tout crin, c'est perdre une partie de l'opinion. La CFDT, elle n'est pas pour appeler à la grève reconductible". Mardi, en tête de cortège, le leader de la CFDT était beaucoup moins catégorique : "Rien n'est exclu, sauf ce qui atteindrait les gens ou les biens. Nous, on restera dans la légalité, toujours. Il faut qu'on fasse une grosse mobilisation samedi, après on verra ce qu'il convient de faire".
"Revirement culturel"
"Si le gouvernement ne renonce pas, Laurent Berger pourrait donc appeler à des grèves reconductibles dans les transports ou l'énergie, par exemple, quitte à pénaliser les Français, ce à quoi il se refusait catégoriquement jusqu'ici. Selon le politologue Dominique Andolfatto, c'est un virage majeur pour le patron du syndicat réformiste". "Là, c'est comme un revirement culturel qui pourrait se dessiner, alors que la CFDT a patiemment sculpté son ADN réformiste depuis une trentaine d'années. C'est un crève coeur pour le gouvernement : non seulement il n'a pas retourné la CFDT qui n'a pas soutenu sa réforme, mais en plus elle pourrait évoluer vers un mouvement plus dur", souligne t-il.
Reste à savoir quand ce virage pourrait s'opérer, avec le début de potentielles grèves reconductibles à l'appel des syndicats. Peut-être dès le 8 mars, le premier mercredi après la fin des vacances scolaires comme le propose le syndicat Solidaires. D'ici là, l'intersyndicale appelle à manifester samedi et jeudi prochains. Et pour rappel, la durée d'examen du texte par le parlement est limitée à 50 jours, du fait de l'utilisation de l'article 47.1 de la Constitution par le gouvernement. Après, l'Assemblée, ce sera au Sénat d'examiner le texte jusqu'au dimanche 12 mars. Le parlement a jusqu'au 26 mars, au plus tard, pour se prononcer sur la réforme des retraites."
https://www.europe1.fr/politique/reforme-des-retraites-laurent-berger-et-la-cfdt-prets-a-durcir-le-mouvement-4166013
"Laurent Berger et Philippe Martinez rient. Epaule contre épaule, ce 7 février à Paris, pour la troisième journée nationale de mobilisation contre le projet de réforme des retraites, ils tiennent la banderole blanche sur laquelle s’étale en lettres rouges ce mot d’ordre : «Travailler plus longtemps, c’est non !» Si les secrétaires généraux de la CFDT et la CGT badinent devant les objectifs, c’est parce qu’ils viennent de recevoir chacun un SMS d’un journaliste qui leur demande de se recoiffer pour la photo. Cette dernière est symbolique. Depuis treize ans, on n’avait pas vu les représentants des deux syndicats les plus puissants de France unis dans la rue contre un projet gouvernemental."
(…)
https://www.liberation.fr/economie/social/retraites-philippe-martinez-et-laurent-berger-font-la-paire-des-choses-20230210_ZKD6GIRU55EHVJKNAZSMARTUR4/
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