mardi 26 juin 2018

Privatisation des barrages français: un acte de haute trahison | Le Club de Mediapart

Privatisation des barrages français: un acte de haute trahison | Le Club de Mediapart

Privatisation des barrages français: un acte de haute trahison

Le gouvernement Philippe, naufrageur de l'intérêt général, a capitulé sans combattre devant une vieille exigence de la Commission européenne. La France sera le seul pays européen à affaiblir un secteur vital en pleine phase de transition vers un nouveau modèle énergétique. Un crime irrémissible contre l'avenir.

Conduite forcée du barrage du Pouget (Aveyron, vallée du Tarn). © EDF Conduite forcée du barrage du Pouget (Aveyron, vallée du Tarn). © EDF
Il fallait s'y attendre. Confier la clef des communs à un transfuge de la banque Rothschild et à un ancien directeur des affaires publiques (autrement dit lobbyiste) d'Areva pour contrer une idéologie d'extrême droite dont on voit bien qu'elle infuse bien au-delà du parti qui l'incarne et s'accommode volontiers du régime néolibéral, sinon l'étaye, c'est comme affecter Renard le goupil et Grimbert le blaireau à la garde de la bergerie pour décourager les entreprises d'Ysengrin le loup : la tentation est trop forte, pour chaque prédateur, de se payer sur l'agneau, en bonne entente avec les autres.

Histoire d'une forfaiture politique

Le 7 février dernier, le gouvernement Philippe, après avoir fait savoir en automne 2017 à l'interfédérale des salariés du secteur hydroélectrique français qu'il ne trouvait rien à redire au principe, a donc acté la privatisation. D'ici 2022, 150 des plus grands barrages (plus de 20 mètres de haut) devraient être vendus, pour une puissance totale de 4,3 GW équivalant à celle de trois réacteurs nucléaires de nouvelle génération. Le reliquat du parc public, sauf effondrement global, sera mis à l'encan avant 2050. EDF, société détenue à 83,5 % par l'État, gère 85 % des 433 concessions du pays (une concession représente un ou plusieurs barrages raccordés à une même centrale électrique). Engie et des structures régionales comme la Compagnie nationale du Rhône ou la Société hydroélectrique du Midi se partagent les 15 % restants.

Centrales hydrauliques en France. © EDF Centrales hydrauliques en France. © EDF
Cela faisait dix ans que la Commission européenne réclamait cette privatisation, avec un acharnement spécial et suspect de la part de la commissaire à la concurrence Margrethe Vestager depuis sa nomination en 2014. Macron et Philippe l'ont signée, sans l'ombre d'une hésitation. Il s'agit de mettre fin à l'abus de « position dominante » d'EDF, incompatible avec l'article 106 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. On n'est plus à une incohérence près. Le secteur nucléaire, réputé stratégique mais en faillite, on n'y touche pas ; en revanche, le secteur hydroélectrique, très profitable mais réputé non stratégique par notre tandem, on peut le vendre à la découpe. Les charognards rôdent depuis longtemps et se sont fait connaître : E.ON (Allemagne), Enel (Italie), Vattenfall (Suède) et Alpiq (Suisse), entre autres. Sous la mandature présidentielle précédente, certains avaient au moins fait mine de résister. Les ministres socialistes Delphine Batho et Ségolène Royal, par exemple, avaient tenté de trouver un moyen terme en proposant de créer des sociétés d'économie mixte pour opérer les petits barrages : la puissance publique y aurait conservé une minorité de blocage de 34 % pour encadrer les éventuels repreneurs privés. Le 16 mai 2014, un décret, le no 2014-479, avait même étendu à de nouveaux secteurs de l'énergie, de l'eau, des transports, des télécommunications et de la santé publique les pouvoirs du décret no 2005-1739, qui portent sur la possibilité donnée au gouvernement de mettre un veto sur des investissements étrangers qui portent atteintes aux intérêts stratégiques. Delphine Batho eût souhaité une renationalisation d'EDF, idée hérétique que Bercy s'empressa d'étouffer dans l'œuf. Vains contre-feux. En juin 2015, la Commission européenne, pas dupe de ces manœuvres, a estimé qu'elles contrevenaient à son credo de la concurrence « libre et non faussée » et a sommé Paris « d'accélérer l'ouverture à la concurrence des concessions hydroélectriques ». Notons au passage que, dans la phraséologie néolibérale, la concurrence « libre et non faussée » ne s'applique qu'au secteur économique – avec les nombreuses exceptions que l'on sait – et pas à la compétition électorale, où les rabais arrangeants sont tolérés.

Le gouvernement Philippe avait une arme pour s'opposer à la Commission, ce décret n° 2014-479. Il n'en a pas usé et a même appuyé sur l'accélérateur. Le scandale n'est pas tant que la France soit le seul pays d'Europe auquel on ait demandé de privatiser ses barrages, mais qu'un gouvernement français ait accédé à cette demande le plus servilement du monde, comme si le secteur hydroélectrique n'était pas lui aussi stratégique, ne fût-ce que pour honorer les engagements de la COP21. En Allemagne, les concessions sont déléguées aux Länder et la Slovénie a constitutionnalisé un « grand service public de l'eau ». Hors UE, en Norvège, qui tire 99 % de son électricité des barrages, les licences hydroélectriques ne sont accordées qu'à des opérateurs publics.

Poule aux œufs d'or et indispensable force d'appoint 

Il faut dire que pour la concurrence si chère à Margrethe Vestager, les barrages français, avec leur excédent brut de 2,5 milliards d'euros par an, dont la moitié revient aux collectivités locales, leur masse salariale faible (21 000 salariés) et leurs installations amorties depuis des lustres, sont une proie de choix. La bête, de surcroît, a été techniquement affaiblie dès avant que la Commission ne revînt à la charge, par un certain… Emmanuel Macron : une de ses premières grandes décisions et son premier grand acte de trahison comme ministre de l'économie aura été d'autoriser l'investissement de l'Américain General Electric dans Alstom. General Electric est à présent actionnaire à 50 % de la branche énergie d'Alstom, qui ravitaille en pièces essentielles les centrales nucléaires (turbines Arabelle de Belfort) et les barrages… Dans l'usine GE-hydro de Grenoble, un plan social de 345 postes (sur 800) assombrit l'avenir du site. Depuis plus d'un siècle, forte d'un savoir-faire unique et mondialement reconnu, cette usine fabriquait sur mesure les turbines des grands barrages français et en assurait la maintenance. En plus d'avoir fourni 25 % de la puissance hydraulique installée dans le monde (dont le barrage des Trois-Gorges en Chine, qui n'est sans doute pas son meilleur motif de gloire) et permis l'essor industriel des Alpes françaises, ses carnets de commandes sont pleins. Oui, pleins ! La décision de GE et le silence du gouvernement sur ce dossier, Nicolas Hulot inclus (les couleuvres, à force, lui sortent par la bouche), sont incompréhensibles, à moins d'y voir une volonté délibérée, d'abord subreptice, désormais frontale, de saborder un secteur vital, de la manufacture aux usages.

Car le secteur hydroélectrique est vital, comme le rappelait Martine Orange en novembre 2015. Il représente 12,5 % de la production d'électricité française, près de 70 % des énergies renouvelables. C'est l'électricité la moins onéreuse : de 20 à 30 euros le MWh. Les centrales hydroélectriques fournissent 66 % de la capacité d'appoint rapide lors des pics de consommation (le reste est assuré par les centrales thermiques). Les barrages, par leurs réserves d'eau, compensent l'intermittence des autres énergies renouvelables et, inversement, en cas de surplus de production de ces dernières, reconstituent leurs stocks par pompage. Par ailleurs, certaines installations complexes, avec conduite forcée et vastes lacs de retenue, nécessitent des compétences particulières et un sens avisé de la coordination avec les collectivités locales bénéficiaires, et ne supportent pas l'amateurisme.

Plaquette EDF expliquant le fonctionnement du groupement de barrages associés à la centrale du Pouget (Aveyron). © EDF Plaquette EDF expliquant le fonctionnement du groupement de barrages associés à la centrale du Pouget (Aveyron). © EDF
Enfin, la bonne gestion du niveau des fleuves et rivières est essentielle pour le refroidissement des centrales nucléaires, implantées majoritairement sur des cours d'eau jalonnés de barrages. On ne peut « arrêter le nucléaire » comme on mouche une chandelle. On peut (on doit) geler la construction de nouvelles centrales, on peut (on doit) les faire démanteler par les nucléocrates, qui seraient malvenus de nous accuser de les envoyer à une mort certaine sans se récuser, mais on a l'obligation vis-à-vis des générations futures d'entretenir et de surveiller sur une échelle de temps inédite les sites de production et de stockage. Nous sommes condamnés à accompagner l'interminable agonie de l'industrie nucléaire et le secteur hydroélectrique est partie prenante de cette veillée cauchemardesque. Les deux secteurs sont donc liés stratégiquement et, en l'occurrence, puisqu'il y va de la sécurité collective et même globale, puisque les pollutions nucléaires ignorent les frontières, affaiblir le secteur des barrages est un crime contre l'avenir et contre les nations.
Répartition des parts de production d'énergie en France. © EDF Répartition des parts de production d'énergie en France. © EDF

Planification d'un désastre

Philippe comme Macron ne peuvent ignorer les méfaits et les dangers mortels de l'immixtion de la concurrence dans les secteurs vitaux. Nous ne citerons que l'inquiétant précédent de la grève de la maintenance organisée par General Electric, justement, dans les centrales nucléaires françaises. L'épisode est rappelé par Pierre Gilbert, dans un article très complet sur la question de la privatisation des barrages. C'était en février 2016. General Electric, par le moyen d'une grève « prenant en otage » (salauds de patrons !) toute une industrie sensible, sans que BFMTV ait daigné faire un micro-trottoir auprès des usagers et éventuels riverains que nous sommes, a cherché à obtenir et a obtenu d'EDF, après plusieurs centaines d'incidents, des conditions plus avantageuses (en termes de responsabilité financière en cas… d'incident). La course à la défausse était lancée. La « libre » concurrence libère en premier lieu ses adeptes du scrupule.  

On imagine fort bien à quels types de chantage les nouveaux propriétaires de barrages pourraient se livrer pour augmenter leurs gains au détriment des communs et de la sécurité : rétention jusqu'au seuil de la pénurie pendant les pics de consommation pour faire monter les prix (rien ne l'empêche juridiquement), fin des lâchers d'eau gratuits en fonction des besoins des vallées (loisirs, agriculture), entre autres exemples signalés par Pierre Gilbert. Un opérateur privé va-t-il anticiper les sécheresses en réfléchissant à des plans de stockage sur le long terme ? Et quid de la maintenance ? EDF investit 400 millions d'euros par an dans l'entretien et le renforcement de ses barrages, dont certains ne sont plus tout jeunes et risqueraient, en cas d'économies de bouts de chandelle, de provoquer des catastrophes. Jean-Bernard Lévy, PDG d'EDF, a déjà prévenu que certains investissements étaient obérés par l'incertitude pesant sur le destin des barrages français. Hors de question pour l'entreprise de lancer des travaux qui profiteraient à de futurs acquéreurs privés. Sauf que certains travaux sont, pour le dire sèchement, urgents. Voilà le genre de petit jeu malsain qu'alimente la concurrence « libre et non faussée ». Le témoignage de Jean-Louis Chauz, président du Conseil économique, social et environnemental d'Occitanie, illustre bien l'appréhension qui gagne peu à peu les collectivités : « En 2035, le déficit de stockage d'eau pour la nouvelle démographie de la région et les besoins de l'agriculture, des écosystèmes, de la préservation de la biodiversité, sera de 1 milliard de m3. EDF et Engie ont provisionné les budgets nécessaires pour engager les travaux pour le stockage d'eau. À l'heure où l'Occitanie est confrontée à un problème majeur de ressources en eau dans les années à venir, à même de compromettre son développement, voire sa sécurité sanitaire, il est incompréhensible et dangereux de chercher à complexifier une organisation de la gestion de l'eau… »

Et s'il ne fallait retenir de cette privatisation que le gain pour les caisses de l'État, là encore les comptables qui nous gouvernent seraient bien en peine de lui trouver quelque avantage. La Cour des comptes a calculé que si l'État en retirait 520 millions d'euros par an de redevances, ce serait Byzance. 520 millions d'euros, ce n'est jamais que cinq fois moins que l'excédent brut actuel…

Instruire le procès en haute trahison

Dans l'article 68 (révisé en 2007) de la Constitution, il est dit que « le président de la République ne peut être destitué qu'en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat ». Pour un président de la République, la haute trahison, au sens de l'article 68 avant révision, se définit comme l'action volontaire d'aller contre les principes que la Constitution le charge de défendre ès qualités. Parmi ces principes, l'article 5 par exemple : « Le président de la République veille au respect de la Constitution. Il assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'État. Il est le garant de l'indépendance nationale et de l'intégrité du territoire. » Il me semble que cet article 5 englobe la question de l'approvisionnement énergétique. Le président Macron est donc coupable, sur ce dossier, de « manquement », conjointement avec le premier ministre. Le 6 décembre 2017, des députés et élus territoriaux de La France insoumise publiaient une tribune de protestation sur le site Reporterre. Il fallait aller plus loin, frapper plus fort, car un tel « manquement » déchire notre horizon et foule ostensiblement aux pieds la Constitution.   

La privatisation des barrages apporte une énième fois la preuve que nous sommes dirigés soit par des aliénés en plein délire paranoïde[*], soit par des naufrageurs embarqués qui, après avoir ôté les derniers rivets de la carène, sabotent les pompes de secours. Eu égard à la Constitution et à ma conception de l'intérêt général, de même que le renoncement politique sur le glyphosate et plus globalement sur l'addiction française aux produits phytosanitaires, cette décision m'apparaît comme un crime contre les intérêts vitaux de la France et des pays voisins, et contre les générations futures, en tant qu'elle fait obstacle à la transition vers une économie décarbonnée, ajoutant une complexité inutile à une complexité déjà mortifère. Tout crime contre l'avenir relève de la haute trahison. Si un certain monde doit disparaître à l'issue des bouleversements climatiques et énergétiques qui ont commencé, il me semble essentiel d'identifier dès maintenant les saccageurs de ce qu'il reste des sociétés humaines, afin que la colère civique ne se déchaîne pas tous azimuts, qu'elle aille frapper au cœur de l'hydre, plutôt que d'en trancher sottement les têtes sans cesse renaissantes.

Damnatio memoriæ pour MM. Macron et Philippe, ainsi que pour leurs comparses, dès après leur mort politique. 

Sources : 
https://www.mediapart.fr/journal/economie/031115/vers-la-privatisation-des-barrages-au-nom-de-la-concurrence
http://lvsl.fr/scandale-de-la-privatisation-des-barrages-une-retenue-sur-le-bon-sens?utm_source=actus_lilo
https://reporterre.net/La-privatisation-des-barrages-met-en-peril-la-transition-energetique
https://www.romandie.com/news/Maintenance-des-turbines-nucleaires-francaises-negociations-serrees-entre-EDF-et-/708764.rom
https://www.ladepeche.fr/article/2018/03/13/2758858-barrages-hydroelectriques-ouverture-a-la-concurrence-des-2018-2018.html
http://www.liberation.fr/france/2018/03/12/barrages-un-coup-de-prive-dans-l-eau_1635665

On peut lire également avec profit le rapport remis le 16 mai 2018 par Sud Énergie à la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale (merci à Dominikvan). 
_______________________
[*] Le délire paranoïde, selon la psychiatre Magali Bodon-Bruzel, est un syndrome délirant caractéristique de la schizophrénie, à mécanisme multiple (hallucinations, illusions, imaginations, interprétations...), non structuré et non systématisé.

Ces 20 amendements montrent que la réforme constitutionnelle vire au "pot-pourri"

Ces 20 amendements montrent que la réforme constitutionnelle vire au "pot-pourri"

Ces 20 amendements montrent que la réforme constitutionnelle vire au "pot-pourri"

Rétablir le septennat, rendre le vote obligatoire, remplacer "droits de l'Homme" par "droits humains"... les députés sont inspirés.

smontgom65 via Getty Images
Ces 20 amendements montrent que la réforme constitutionnelle vire au "pot-pourri".

POLITIQUE - Réforme de la Constitution, acte 1. Ce mardi 26 juin s'engage à l'Assemblée nationale la première bataille sur le projet de révision constitutionnelle du gouvernement. Majorité et oppositions vont faire assaut de propositions en commission, les uns pour enrichir, les autres pour déconstruire certaines mesures voulues par Emmanuel Macron.

Réforme du Conseil supérieur de la magistrature, différenciations territoriales accrues, avec mention de la Corse, suppression de la Cour de justice de la République sont au (très large) menu du projet de loi "pour une démocratie plus représentative, responsable et efficace". Plus contestée, l'accélération de la procédure parlementaire d'adoption des textes est également à l'ordre du jour. La majorité invoque "l'efficacité", les oppositions de droite et de gauche dénoncent un "affaiblissement du Parlement", avec notamment un droit d'amendement restreint.

Si elle planchera jusqu'à jeudi sur 18 articles, la commission des Lois de l'Assemblée ne fera que des choix indicatifs sur environ 1300 amendements de tous bords. Du passage à l'octennat à la création d'un poste de vice-Premier ministre en passant par la féminisation de la Constitution, la réforme vire quelque peu au "pot-pourri", permettant notamment à certaines formations politiques de tenter de faire passer certaines de leurs promesses de campagne. Beaucoup n'ont d'ailleurs que très peu de chance d'être définitivement adoptée.

Les amendements institutionnels

Rétablir le septennat (ou créer un octennat)

Pour "régénérer l'exercice du pouvoir exécutif", les députés Les Constructifs proposent de revenir à un mandat de sept ans. "Non renouvelable", il permettrait selon eux au président de la République de faire des "réformes ambitieuses", sans penser à une éventuelle réélection. Julien Aubert et Éric Straumann, deux députés Les Républicains veulent même aller plus loin, en proposant un mandat de huit ans.

Limiter le nombre de ministres

"Alors que le nombre maximal de députés et de sénateurs est désormais fixé par la Constitution, il n'en est pas de même pour le nombre de membres du gouvernement", constate la députée LREM Claire O'Petit. C'est pourquoi elle propose de limiter à 35 le nombre de ministres dans un gouvernement, pour "rationaliser les coûts" et apporter "une meilleure lecture de la politique gouvernementale."

Organiser les élections législatives et présidentielle le même jour

Les élus Insoumis proposent d'organiser les élections législatives le même jour que la présidentielle pour mettre fin à la "prédominance marquée et préjudiciable" du pouvoir exécutif sur le législatif. Ainsi, l'élection des députés ne serait pas influencée par la couleur du président de la République tout juste élu.

Supprimer la grâce présidentielle

Le doit de grâce du président de la République avait déjà été modifié en 2008. Plusieurs élus Les Républicains proposent, à l'occasion de cette nouvelle révision constitutionnelle de purement et simplement supprimer cette prérogative présidentielle. D'autres, comme les députés Les Constructifs, souhaitent qu'il soit utilisable "pour les seuls crimes", quand les communistes veulent que le Conseil supérieur de la magistrature émette un avis avant la demande de grâce en question.

Supprimer le mot "race"

Plusieurs amendements déposés par les députés visent à supprimer le mot "race" du premier alinéa de l'article 1er de la Constitution. C'est la phrase "[La République] assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion" qui pose problème. Certains proposent de s'arrêter au mot "citoyens" quand d'autres souhaitent remplacer "de race" par "de sexe." Il s'agit d'une ancienne promesse de campagne de François Hollande, qui n'avait pu aboutir faute de majorité au Congrès.

Adosser une "Charte du numérique" à la Constitution

Des parlementaires de tous bords proposent d'adosser à la Constitution une "Charte du numérique", à l'instar de la Charte de l'environnement adoptée en 2004-2005. Les sept articles proposés stipulent notamment que "la loi garantit à toute personne un droit d'accès aux réseaux numériques libre, égal et sans discrimination", et que les réseaux numériques "respectent le principe de neutralité qui implique un trafic libre et l'égalité de traitement".

Les amendements "citoyens"

Rendre le vote obligatoire

Plusieurs députés de gauche, de la France insoumise au Parti socialiste, veulent instaurer le vote obligatoire. Les élus LFI estiment qu'il est nécessaire de "renforcer" et "d'élargir" la citoyenneté, "ce par l'intermédiaire de mesures fortes et d'avenir telle la reconnaissance du vote obligatoire à 16 ans, ainsi que la reconnaissance du vote blanc."

Créer la possibilité pour les citoyens de révoquer le Président

Promesse de campagne de Jean-Luc Mélenchon, la possibilité de révoquer le président de la République serait inscrite dans la Constitution. La révocation du chef de l'État pourrait ainsi être demandée par un référendum "organisé sur l'initiative d'un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales."

Permettre aux citoyens de soumettre au référendum une proposition de loi

Comme la possibilité de révoquer le président de la République, permettre aux citoyens de faire adopter une loi, via référendum, était une promesse de campagne de Jean-Luc Mélenchon, désormais transformée en amendement au projet de révision constitutionnelle. Pour organiser un référendum il faudrait qu'un dixième des électeurs inscrits sur les listes se prononcent en faveur du texte en question.

Donner le droit de vote aux étrangers

Les Insoumis, visiblement inspirés par ce projet de révision de la Constitution, veulent également accorder le droit de vote aux étrangers pour les élections municipales et départementales, "sous condition de résidence régulière."

Les amendements "territoriaux"

Revoir le statut de La Réunion

Les Outre-mer disposent d'une diversité de statuts. Certains comme la Martinique, la Guadeloupe ou la Guyane sont régis par l'article 73 de la Constitution, qui les soumet aux mêmes règles juridiques que la métropole, avec des possibilités d'adaptations sur de nombreux champs, hormis le domaine régalien. L'amendement, déposé par les députés de la Délégation aux Outre-mer de l'Assemblée nationale, de tous bords politiques, vise à inscrire la Réunion sous ce statut là, elle qui en est exclue depuis 2003 et l'amendement Virapoullé.

Reconnaître les langues régionales

Une série d'amendements vise à inscrire les langues régionales dans la Constitution. Majoritairement déposées par les députés de Corse (et les "marcheurs" Paul Molac et François Michel-Lambert) ces propositions vont de l'inscription du respect "de la diversité culturelle et linguistique du pays" dans l'article 1 à la reconnaissance des langues régionales dans l'article 2.

Faire de la Corse un territoire d'outre-mer

Également déposé par l'élu corse Jean-Félix Acquaviva, un amendement propose de faire de l'île de Beauté un "territoire d'outre-mer', "pouvant prétendre à l'autonomie dans un cadre démocratique et consenti."

Créer le statut de "Pays d'outre-mer"

Le député LREM de Guyane Lenaïck Adam propose de créer un statut de "Pays d'outre-mer." Dans un amendement déposé auprès de son groupe, il estime que cela permettra "une autonomie sur mesure pour chacun des territoires, où chaque population pourra choisir le modèle le plus adapté à ses spécificités".

Les amendements "féministes"

Intégrer l'écriture inclusive dans la Constitution

La lutte pour légalité entre les hommes et les femmes trouve également sa place dans le projet de révision de la Constitution. Pour en terminer avec "l'invisibilisation des femmes dans le droit", la députée Isabelle Rauch et plusieurs de ses collègues de la majorité proposent de "féminiser les terminologies dans la Constitution." Si l'amendement est adopté, le texte écrira désormais "le président, ou la présidente", "le candidat ou la candidate" etc.

Remplacer droits de l'Homme par "droits humains"

Dans le même esprit, une dizaine de députés LREM propose de remplacer le terme "droits de l'Homme" par "droits humains."

Faire que la Constitution "garantisse" et non plus "favorise" l'égalité hommes-femmes

L'importance de la nuance. L'amendement déposé par les députés LREM Alain Tourret, Christophe Blanchet et Sonia Krimi vise à remplacer un mot dans le second alinéa de l'article 1er de la Constitution. S'il est adopté, le mot "favorise" sera ainsi remplacé par "garantit" dans la phrase suivante: "La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales."

Inscrire dans le préambule un accès gratuit à la contraception et à l'IVG

Les députés Insoumis, appuyés par une petite dizaine d'élus de la majorité souhaitent ajouter "le droit à l'avortement des femmes ainsi que le droit à la contraception de toute personne" dans le préambule de la Constitution.

Les amendements "environnementaux"

Créer le poste de "vice-Premier ministre chargé du Développement durable"

C'était une proposition de Nicolas Hulot lui-même. Dans son Pacte pour l'écologie, le défenseur de l'environnement prônait la création du poste de "vice-Premier ministre chargé du Développement durable." Plus de dix ans plus tard, le député LREM François-Michel Lambert et dix-huit de ses collègues proposent la création de cette fonction. Le vice-Premier ministre serait alors responsable "de l'insertion de l'impératif écologique dans l'ensemble des politiques de l'État", et devrait rendre compte de sa politique tous les ans devant l'Assemblée nationale.

Inscrire la défense de l'environnement dès l'article 1 de la Constitution

C'est un symbole fort qui permettrait de mieux protéger la planète: Nicolas Hulot a annoncé que la défense de l'environnement serait inscrite dans l'article 1 de la Constitution, et non dans l'article 34 comme envisagé initialement, rejoignant la volonté de plusieurs parlementaires de la majorité. Reste à trouver la bonne formulation.

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Trump critique la décision de Harley-Davidson de délocaliser

Trump critique la décision de Harley-Davidson de délocaliser

Trump critique la décision de Harley-Davidson de délocaliser

« Surpris compagnies Harley-Davidson hisser drapeau blanc », tweeté locataire Maison Blanche
« Surpris que de toutes les compagnies Harley-Davidson soit la première à hisser le drapeau blanc », a tweeté le locataire de la Maison Blanche - Sean Rayford/Getty Images/AFP

La réponse de Trump n'aura pas tardé. Seulement quelques heures après l'annonce par Harley-Davidson de son intention de  délocaliser une partie de sa production  hors des Etats-Unis afin d'éviter les tarifs douaniers européens, Donald Trump a publiquement critiqué la décision du légendaire constructeur moto.

« Surpris que de toutes les entreprises, Harley-Davidson soit la première à hisser le drapeau blanc. Je me suis battu dur pour eux et finalement ils ne vont pas payer les droits de douane dans l'UE », a écrit Trump sur Twitter. Ajoutant : « Les taxes sont seulement une excuse pour Harley - soyez patients ! »

Surprised that Harley-Davidson, of all companies, would be the first to wave the White Flag. I fought hard for them and ultimately they will not pay tariffs selling into the E.U., which has hurt us badly on trade, down $151 Billion. Taxes just a Harley excuse - be patient!

— Donald J. Trump (@realDonaldTrump)
 

Harley-Davidson a choisi de délocaliser une partie de sa production, notamment en Asie, pour éviter les taxes adoptées par Bruxelles  à titre de représailles  contre les Washington. Les Européens ont choisi de manière ciblée les produits visés, notamment ceux qui touchent les Etats dirigés par les républicains.

Hausse de 2.200 dollars par moto

Le constructeur moto installé depuis 115 ans à Milwaukee (Wisconsin) a expliqué dans un document présenté lundi que les droits prévus par les Européens se traduiraient par une hausse de 2.200 dollars (1.900 euros) en moyenne par moto exportée depuis les Etats-Unis vers l'Union européenne.

Actuellement, le prix d'entrée de gamme de Harley-Davidson en France est de 7.490 euros. Harley estime que les tarifs douaniers européens vont se traduire par une hausse des coûts comprise entre 30 et 45 millions de dollars pour le reste de 2018 et d'une hausse de 80 à 100 millions de dollars en année pleine.

lundi 25 juin 2018

Collectif Solidarité Grèce Alès Cévennes


Les collectifs de solidarité avec le peuple grec d'Alès­, Avignon et Nîmes se réunissent pour à nouveau envoyer au mois d'août 2018 un fourgon sanitaire en Grèce, cette fois-ci à l'Hôpital de Filiates et à plusieurs dispensaires autogérés à Athènes.

La crise grecque est toujours là, ainsi que la pression des mesures d'austérité. Épuisé, le pays est au bord de l'effondrement financier, économique et moral.

La banque de Grèce, qu'on ne peut soupçonner de complaisance, a dressé un bilan grave sur la santé de la population grecque. Malgré une légère amélioration du système de santé les chiffres qu'elle donne sont accablants  : 13  % de la population sont exclus de tout soin médical ; 11,5 % ne peuvent acheter les médicaments prescrits ; les personnes souffrant de problèmes chroniques de santé sont en hausse de 24,2 %. Suicides, dépressions, maladies mentales enregistrent des hausses exponentielles.

Autre exemple terrible : en 2019 les pensions de retraite seront diminuées de 18%, pour la douzième fois.

En plus nous avons appris que le dispensaire autogéré de la première heure, d'Ellinikon à Athènes, est menacé par la fermeture.

Et c'est à ce pays que l'Europe demande en plus d'assumer seul ou presque l'accueil des réfugiés venant en Europe.

Plus que jamais la Grèce a besoin de vous,

parce que le voyage du fourgon sera financé par vos dons et assuré par des bénévoles de nos collectifs.

La brochure avec tous les renseignements et modalités vous sera envoyée sur simple demande : cevennes.grece@gmail.com

Merci pour eux.

Le Collectif Alès/Cévennes

ÇA RESTE ENTRE NOUS Les indiscrétions de la semaine - Objectif Gard

ÇA RESTE ENTRE NOUS Les indiscrétions de la semaine - Objectif Gard

ÇA RESTE ENTRE NOUS Les indiscrétions de la semaine

Comme tous les dimanches, Objectif Gard vous propose son cocktail d'indiscrétions politiques. Un digestif hebdomadaire à déguster sans modération !

Le bal des faux culs. Cette semaine, nous allons vous dévoiler la teneur véritable des relations qu'entretiennent nos cinq députés gardois du mouvement La République en marche ! Et vous allez le voir, c'est un sacré feuilleton car, derrière les bonnes manières de circonstance et la bienséance de façade, la réalité n'est pas celle que l'on pourrait imaginer. Accrochez-vous ! Commençons par Annie Chapelier : elle apprécie les députés Philippe Berta et Anthony Cellier, mais trouve Olivier Gaillard "un peu machiste sur les bords". Quant à Françoise Dumas, elle ne la voit jamais, "elle est toujours à l'étranger". Et bam, sur le bec ! Si officiellement, Françoise Dumas et Olivier Gaillard ne veulent pas réagir et souhaitent rester dignes, officieusement, ils ne peuvent pas se retenir et, croyez-nous, c'est beaucoup moins glorieux. On vous passera les noms d'oiseaux et l'on résumera ainsi : Françoise et Olivier détestent Annie. Seulement l'affaire se complique. En "off" toujours, selon des propos rapportés, Anthony Cellier n'aimerait pas beaucoup non plus Annie, alors que celle-ci l'apprécie. On vous l'avait dit, au sein du petit microcosme des députés gardois de la cohorte présidentielle, c'est un monde cruel. Dans cet univers impitoyable que n'auraient pas renié les fans de la série télévisée Dallas, seul Philippe Berta, plus sage ou plus chanceux, semble passer, pour le moment, à travers les fourches caudines de la critique. Fort heureusement, et pour finir sur une note plus positive, le sixième larron, Gilbert Collard, réussit à fédérer nos cinq députés autour d'un mépris unanime. Inutile de souligner que ce dernier en est certainement ravi. C'est bien connu, Gilbert ne danse pas au bal des faux-culs...

Jérémy Rosier au cabinet du maire ? C'est l'idée qui germe dans la tête de plusieurs élus à la ville de Nîmes. Une embauche pour pallier le départ de Jean-Albert Chièze, ex-directeur de cabinet du maire, Jean-Paul Fournier. Embauché depuis 2012 comme collaborateur de Franck Proust, cet homme de l'ombre est titulaire d'un master en droit juriste européen. Il a fait ses premières armes au cabinet de l'ex-ministre et président du CESE (Conseil économique sociale et environnemental), Jean-Paul Delevoye. Pour les partisans de M.Rosier, c'est surtout « sa connaissance du milieu local qui pourrait être un plus pour la préparation des prochaines Municipales. » Reste à savoir si son patron, Franck Proust, serait prêt à s'en séparer…

La fibre optique pour tous, bientôt dans le Gard. WiGard, c'est le nom du réseau très haut débit que le Département du Gard construit pour les Gardois. Il va signer la fin des inégalités entre communes gardoises grâce aux 269 millions d'euros investis par le Département. Les Gardois bénéficieront d'abord d'une montée en débit dans les territoires non ou peu desservis d'ici 2020, puis de l'accès au très haut débit grâce à la fibre optique d'ici 2022. C'est lors de la session du 11 juillet prochain que l'assemblée départementale validera le choix de l'opérateur après une étape en cours de négociation exclusive. Les premiers travaux pourraient débuter en fin d'année.

Municipales : ça pourrait « marcher » pour Les Républicains… C'est du moins ce qu'a laissé entendre Marc Taulelle, adjoint à la ville de Nîmes et farouche partisan d'un quatrième mandat de Jean-Paul Fournier. Comme l'a soumis la direction nationale d'En Marche !, le Républicain n'est pas contre l'idée d'intégrer quelques marcheurs dans la liste des prochaines Municipales. « Après ça dépend lesquels ! Ce qui m'intéresse, c'est la compétence. Stéphane Tortajada, qui est chef d'entreprise et l'attaché parlementaire du député Berta, François Courdil, le sont. »

L'amiante plombe la série TV au collège Bigot. Selon nos informations, la société de production qui devait louer les anciens locaux du Collège Bigot à Nîmes a fait machine arrière. Le projet de tournage d'une série TV est donc définitivement abandonné. La raison en est que l'ancien établissement scolaire recèle beaucoup d'amiante et que la dépollution du site entraînerait un surcoût trop important pour la production. Par contre, le Département, ayant toujours un coup d'avance, a cette fois déjà de nouveaux potentiels acheteurs. C'est une société immobilière qui proposerait le projet le plus séduisant comportant un volet social et économique. Affaire à suivre là aussi le 11 juillet prochain lors de l'assemblée départementale.

Lulu et les élus. Il y a plusieurs jours, un observateur de la vie politique nîmoise est entré en contact avec notre rédaction sous couvert d'anonymat et sans apporter de preuve aux infos qu'il pense détenir. Celui qui se fait appeler Lulu nous assure que les contacts se multiplient entre l'adjoint Les Républicains de Nîmes, Richard Tiberibo, et l'élu Rassemblement national (ex-Front national),Yoann Gillet, en vue des prochaines Municipales. Aux dires de notre nouvel ami,  "les deux élus, sur une ligne commune, préparent l'avenir et notamment l'après Fournier. Ils ne cachent d'ailleurs plus en public leur entente très cordiale"Une prise de guerre pour le RN ? Ce ne serait pas étonnant quand on sait à quel point Yoann Gillet, issu lui-même de l'UMP, entretient d'excellentes relations avec les élus LR (en dehors de Fournier, Proust et Burgoa). Info ou intox ? L'avenir le dira et d'ici là Lulu sera peut-être sorti de l'anonymat. En attendant, qu'on se le dise : Lulu est comme Dieu ou le sucre dans le café, il est partout mais on ne le voit pas... 

Bonne nouvelle pour Magna Porta. Le laboratoire Nîmois Phytocontrol, leader français des analyses de contaminants s'est associé avec Nîmes métropole dans le cadre d'un projet de plateforme technologique sur la sécurité alimentaire et la promotion de l'agriculture durable. À terme l'objectif est d'accueillir des chercheurs français et internationaux sur 1000 m2 sur le site Magna Porta de Manduel-Redessan. Ces chercheurs seraient accueillis à côté du futur hôtel d'entreprise du Mas Larrier. Il y a quelques jours, les porteurs du projet ont appris la bonne nouvelle : le projet est éligible dans le cadre du Programme d'investissements d'avenir (PIA). Doté de près de 57 milliards d'euros, ce programme mis en place par l'État vise à financer des investissements innovants et prometteurs sur tous les territoires.

La rédaction


Vaisselle de l’Élysée, piscine de Brégançon et argent du contribuable | Contrepoints

Vaisselle de l'Élysée, piscine de Brégançon et argent du contribuable | Contrepoints
Note du reboussier:
BOFFF


Vaisselle de l'Élysée, piscine de Brégançon et argent du contribuable

Au milieu de la polémique du renouvellement de la vaisselle ou la création d'une piscine pour le président, d'autres détails surprenants méritent une petite explication.

Par Nathalie MP.

Ainsi donc, nous apprenions récemment que le palais de l'Élysée avait commandé à la Manufacture nationale de Sèvres un service de table de 1200 pièces dont le coût pourrait atteindre 500 000 € selon les savants calculs du Canard enchaîné. Peu après, il était question de la construction d'une piscine hors-sol pour le fort de Brégançon, villégiature présidentielle dont Emmanuel Macron a fait sa résidence d'été privilégiée.

Évidemment, venant juste après les déclarations fracassantes – mais pas complètement injustifiées – du Président sur le « pognon de dingue » englouti dans notre modèle social, et tombant pile au moment où le gouvernement a annoncé que les APL ne seront pas revalorisées comme d'habitude au 1er octobre, ces révélations font désordre.

Il n'en fallait pas plus pour déclencher une jolie petite polémique comme on les aime sur les goûts extravagants de notre Président décidément fort peu « normal » et dont la « verticalité jupitérienne » finit par ressembler à des caprices de star.

Meneur de la fronde, le député Insoumis François Ruffin en a profité une fois de plus pour ironiser sur ce qui, selon lui, caractérise la politique d'Emmanuel Macron :

Quand on donne aux pauvres, c'est du gâchis. Quand on donne aux riches, c'est de l'in-ve-sti-sse-ment.

Sauf que la structure de nos comptes publics montre au contraire que notre modèle est fondé sur une très forte redistribution qui consiste à prendre aux « riches » par l'impôt (par exemple, 25% de l'IR est payé par 1% des ménages) et les cotisations sociales (très allégées sur les bas salaires) et à redonner aux « pauvres » via les prestations sociales, le tout aboutissant à des niveaux de dépenses (57% du PIB), de prélèvement (45,4%), de déficit (2,6%) et de dette (97%) parmi les plus élevés du monde développé.

Contrairement à ce que raconte M. Ruffin, quand un gouvernement décide contre l'opinion dominante de baisser les APL, il ne le fait pas dans le but spécifiquement cynique de « prendre » aux pauvres pour « enrichir les riches », mais pour essayer de mettre fin aux effets pervers d'un interventionnisme apparemment généreux mais en réalité délétère – en l'occurrence l'effet inflationniste sur les loyers.

Vaisselle, piscine : y a-t-il un scandale ?

D'ailleurs, renseignements pris, les deux affaires sus-mentionnées se présentent sous un jour légèrement différent de celui que Ruffin tente d'accréditer. Pour la piscine de Brégançon, les raisons avancées concernent la protection de la vie privée, les impératifs de sécurité qui se compliquent et donc se renchérissent nettement en cas de baignade en mer du Président et sa famille et la possibilité d'y recevoir des chefs d'État étrangers.

Le financement (peu élevé, s'agissant d'un bassin hors-sol) se ferait dans le cadre du budget annuel alloué à cette résidence présidentielle, soit 150 000 €. Il est de plus question d'y affecter des recettes qui proviendraient de la vente des produits (mugs, cravates, porte-clefs…) de la nouvelle boutique « Élysée – Présidence de la République ».

Ces recettes permettraient aussi d'avancer sur la rénovation du palais de l'Élysée. Son budget global de fonctionnement a été fixé à 104 millions d'euros pour 2018, soit une augmentation de 3% sur 2017, mais le budget séparé alloué aux travaux a été mis en suspens. Or il est de notoriété publique que certaines ailes ne sont pas entretenues depuis de nombreuses années.

Concernant directement la commande de vaisselle, le coût total serait de 50 000 € pour rémunérer les deux artistes finalistes qui ont participé au concours, à quoi il faut ajouter le coût de fabrication. C'est ce dernier que le Canard enchaîné a évalué à 500 000 € en se basant sur un prix moyen de 400 € par assiette. Selon la directrice de la Manufacture de Sèvres, le coût n'est pas encore parfaitement connu car chaque assiette est unique, mais il serait plus près de 200 € pièce, soit à peu près 250 000 €.

Évidemment, toute la question est de savoir ce que les Français sont prêts à payer pour assurer la représentation régalienne du chef d'un État qui figure quand même parmi les dix premières économies mondiales. Le misérabilisme qui consiste à s'indigner chaque fois que des travaux de modernisation sont entrepris n'est pas forcément très judicieux.

Il est à noter que tant la vaisselle que la piscine resteront à la Présidence de la République après le départ de M. Macron, tandis que (pour prendre un exemple) le petit aller-retour en avion aux frais du contribuable effectué par Manuel Valls en juin 2015 pour assister à un match de foot (FC Barcelone contre Juventus de Turin) à Berlin représentait bien un abus de bien public et traduisait incontestablement ce détestable sentiment qui fait qu'une fois élus par le peuple nos dirigeants se croient tout permis et n'hésitent pas à mélanger allègrement ce qui relève du service de ce peuple et ce qui relève de leur propre satisfaction.

Aussi, pour moi, remplacer certains éléments de la vaisselle de l'Élysée tous les quinze ou vingt ans ne me semble pas être un grave problème.

En revanche, on découvre à cette occasion que l'État est vraiment doué d'une extraordinaire polyvalence : parmi ses attributions, existe aussi celle de fabriquer de la vaisselle de luxe en porcelaine ! C'est là qu'il y a lieu de se poser quelques questions.

Vaisselle et ministère de la Culture

Pour faire retomber la polémique, le gouvernement a fait savoir que le coût de la commande n'impacterait nullement les comptes de l'Élysée puisqu'il relève entièrement des attributions de la Manufacture nationale de Sèvres, laquelle… est lourdement subventionnée par le ministère de la Culture.

En 2016, sur un budget total de 7 millions d'euros, les subventions représentaient 4 millions, les ventes de produits 1,8 million et les autres recettes type billetterie et mécénat 1,2 million (page 156 du PDF). D'après le Canard enchaîné, qui relève bien la charge pour le contribuable sans en tirer toutes les conséquences, les subventions 2018 seraient de 4,4 millions d'euros (voir ci-dessus).

Autrement dit, si les besoins de l'Élysée en matière de vaisselle de prestige en lien avec son rang de haut lieu régalien représentent des sommes pouvant aller jusqu'à 500 000 € tous les 15 ou 20 ans, il ne s'agit là que de la pointe émergée de l'iceberg car la Manufacture de Sèvres vit aux frais du contribuable à raison de 4,4 millions d'euros par an, ce qui constitue un tout autre niveau de dépenses. Encore un exemple de la façon dont le budget annuel du ministère de la Culture finit par atteindre 6 milliards d'euros en plus des 4 milliards consacrés à l'audio visuel public.

D'ailleurs, concernant les 50 000 € destinés à défrayer les artistes, la manufacture a demandé une petite « rallonge » au ministère de la Culture. Quels efforts de productivité et de créativité pourrait-elle faire dès lors qu'elle est assurée de recevoir sa subvention étatique et qu'elle se sait en mesure d'obtenir facilement des enveloppes supplémentaires dès lors qu'on pourra commodément les mettre sur le compte de la fameuse exception culturelle française ?

On pourrait fort bien imaginer que l'Élysée se fournisse auprès de fabricants privés mis en concurrence et ainsi toujours poussés à améliorer l'attractivité de leurs produits sur le plan du design comme sur celui de la fabrication.

Manufacture de Sèvres : subventions et commandes publiques

Mais l'on constate que perdure en 2018 le système économique très interventionniste mis au point par Colbert, Contrôleur général des Finances de Louis XIV, dans les années 1660. Selon les thèses du mercantilisme qui régissait alors l'action économique des monarchies absolues, toute son action pour renforcer la puissance économique de la France se déploya dans le triptyque « protectionnisme, subventions et commandes publiques. » On parlerait aujourd'hui d'État-stratège.

Datant de 1740, la Manufacture de Sèvres n'a évidemment pas été créée par Colbert lui-même, mais elle est correspond exactement à ce type de politique économique, poursuivie sous Louis XV, qui met toute la création de richesse au service de l'État plus qu'au service du consommateur. Emmanuel Macron n'en est évidemment pas plus le créateur, mais nombreux sont les traits de son action politique et économique qui visent à restaurer le pouvoir de l'État-stratège, notamment le fonds pour les start-up et le plan entreprises de Bruno Le Maire.

Nul doute qu'à l'abri des subventions et des petites « rallonges », la renommée et le savoir-faire de la Manufacture de Sèvres sont bien protégés. Mais on voit mal où elle va trouver les ressources entrepreneuriales et créatives pour s'adapter à un marché du luxe dont la branche « arts de la table » sort à peine de 10 ans de grandes difficultés, autrement qu'en continuant à faire ce qu'elle a toujours fait grâce à la manne d'un financement étatique assuré tandis que les consommateurs sont demandeurs d'autre chose.

Quant à François Ruffin, notons combien son ironie tombe à plat. En commandant ce service de table, Macron n'a rien fait d'autre que de s'inscrire exactement dans ce que la France insoumise, la CGT et pas mal d'autres attendent de l'État : qu'il soutienne des entreprises incapables de vivre par elles-mêmes. Si ce n'est pas au nom de notre modèle social ou de nos services publics, rassurez-vous, il reste encore notre exception culturelle à bichonner.

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